Dans l’horreur, pour trouver de la qualité, les amateurs savent qu’ils peuvent se diriger vers les court-métrages, qui par leur concision parviennent à faire tenir leur ambiance d’un bout à l’autre. Pour vivre le frisson en long métrage, on apprécie particulièrement certains films d’anthologie, où de nombreux réalisateurs s’essaient au segment, souvent pour le meilleur. Ryan Spindell, dont les court-métrages ont déjà fait parler de lui, s’essaie seul à l’exercice, offrant une anthologie de quatre segments reliés par un cinquième, fil conducteur de sa « collection mortuaire ».
Le manoir hanté, patron des contes cryptiques
The Mortuary Collection met en scène Montgomery Dark, croque-mort en charge du funérarium d’une petite ville américaine. Dans une immense bâtisse – un manoir plus précisément, faisant penser à la demeure de La Famille Addams – macabre et lugubre, il y reçoit, après un enterrement, la visite de Sam, jeune fille venue répondre à une offre d’emploi pour l’assister dans ses fonctions. Fascinée par l’ambiance pesante et le vieil homme, elle le lance dans un concours d’histoires glauques, Montgomery mêlant son imaginaire et des faits concernant des corps dont il s’est occupé lors de ses services mortuaires. Le récit se scinde en scénettes, allant crescendo dans la proposition horrifique, pour apporter à Sam, ainsi qu’à nous, frayeurs et excitations.

Quatre doses de plaisir
Là où l’on pouvait s’effrayer d’avoir un métrage inégal, dépendant de la qualité de ses segments, il n’en est rien. Les quatre histoires parviennent sans mal à nous emporter avec elles. Pour un film au budget si réduit, on est étonné d’une telle qualité. L’image imprime la rétine, que ce soit par l’animal vivant dans l’armoire à pharmacie du premier segment, l’homme enceint du second, ou les monstres du dernier, aucun effet cheap, le tout souligné par une mise en scène qui alterne terreur et rires avec brio. Un rire qui ne désamorce jamais la tension mais teinte d’ironie les différentes situations. Des références à foison pour cet abécédaire de l’horreur – l’un des personnages regarde à la télévision The Babysitter Murders, l’un des court-métrages de Spindell, et surtout une référence directe au titre original d’Halloween de John Carpenter – qui parvient à éviter l’effet catalogue, tout en emmenant chaque histoire dans une ambiance différente.
À l’instar de Sam, chaque histoire racontée nous plonge encore plus dans le malaise mais nous donne envie d’en entendre la suivante, de voir quelles limites vont être dépassées. Chacune étant sur une thématique différente malgré de nombreuses similitudes – les mêmes lieux, des personnages qui se répondent -, l’ennui n’arrive jamais, mais au contraire l’excitation survient à chaque nouveau chapitre. Comme on l’a cité précédemment, l’intelligence de Spindell demeure en son cinquième récit, celui qui englobe ces histoires racontées, qui tient tout son sens dans l’accomplissement de ces dernières. Les masques se délitent, les rôles s’inversent, et le jeu de manipulation entre Montgomery Dark et Sam prend une tournure tout aussi jouissive qu’inattendue.

On pense à Scary Stories To Tell In The Dark, qui tentait aussi l’exercice de la fragmentation en sketches avec un certain impact. Ici, Ryan Spindell réussit son pari, et offre un tour de manège plus qu’agréable, d’autant plus lorsque l’on sait qu’il est assemblé par bouts de ficelle. Un cinéaste extrêmement prometteur, qui on l’espère titillera la curiosité de productions pouvant lui offrir un budget permettant de laisser libre cours à son imaginaire débordant.
The Mortuary Collection, de Ryan Spindell. Avec Clancy Brown, Caitlin Cluster, Christine Marie Kilmer…1h48
Pas de date de sortie pour l’instant.
[…] véritables plaisirs qu’il aurait été difficile de découvrir ailleurs qu’au PIFFF. The Mortuary Collection et son découpage en sketches qui nous ravit, ou encore Why Don’t You Just Die, petite folie […]