Premier film du réalisateur français Élie Grappe, Olga s’est distingué lors de la dernière édition de la Semaine de la Critique du Festival de Cannes en y remportant le Prix SACD. À travers son long-métrage, le réalisateur dresse le portrait de Olga, une gymnaste ukrainienne de 15 ans qui, face au danger suscité par le métier de sa mère, journaliste couvrant les événements de la révolution ukrainienne, est obligée de s’exiler en Suisse afin de pouvoir continuer à s’entraîner dans l’espoir de participer à la prochaine édition des Jeux Olympiques.
De par les divers sujets qui l’entourent et avec lesquels celui-ci entre souvent en confrontation, le sport n’apparait, au sein de Olga, non pas comme figure centrale, mais plutôt telle une thématique vectrice d’interactivités. La pratique d’une activité sportive se dessine ainsi à travers les difficultés que ce sport crée et auxquelles il est lui-même confronté. C’est premièrement cette relation mère/fille, indéniablement complexe, qui apparait telle une première barrière à l’épanouissement par le sport pour Olga. Ici, la mère et la fille sont tiraillées entre les passions qui les animent et l’amour qu’elles se portent l’une à l’autre. La mère d’Olga refuse ainsi de délaisser son travail de journaliste, quitte à creuser une forme de distanciation entre elle et sa fille. Olga, quant à elle, serait prête à mettre tous les moyens qu’elle a à disposition afin de se donner davantage de chances de participer aux Jeux, même si cela implique de laisser derrière elle son pays natal. Émerge un semblant de notion de choix qui est très rapidement mis en opposition avec la notion de contrainte. La mère d’Olga ne se donne pas la possibilité d’arrêter d’informer la population de manière indépendante via son journal. Cependant, mettre un terme à son travail serait un risque de laisser le totalitarisme l’emporter sur la liberté. Subissant cette situation, sa fille n’a pas d’autres choix que de quitter l’Ukraine et de se rendre en Suisse, loin du danger que représente la liberté d’expression dont fait preuve sa mère.
Cette migration athlétique effectuée par Olga dans l’espoir de pouvoir s’épanouir au sein de son sport rencontre comme premier obstacle le choc des cultures. Celui-ci s’observe, avant tout, dans la barrière de la langue. Olga peine à s’exprimer dans une autre langue que sa langue natale et ne parvient à comprendre ni l’allemand ni le français, parlés par les athlètes suisses. En découlent, pour Élie Grappe, des choix de réalisation forts de sens. Olga est rapidement écartée des autres gymnastes au sein de la diégèse, mais également à travers les différents cadrages dont la symétrie, la proximité, ou l’éloignement total, l’isolent radicalement.

C’est dans le redoublement d’efforts afin de se faire une place, par le sport, qu’Olga se démarque des autres athlètes. Cependant, il est difficile pour elle de se concentrer sur l’aspect performatif de la gymnastique en suivant, parallèlement à sa nouvelle vie en Suisse, les actualités diplomatiques de l’Ukraine et la situation délicate dans laquelle se trouve sa mère. Il est ici intéressant de voir comment le sport et la politique s’entrecroisent dans la vie de cette famille et influent l’un sur l’autre. En effet, même si les tensions politiques se répercutent sur la concentration des sportives ukrainiennes, le sport, à l’inverse, a également la possibilité de se révéler comme un véritable ambassadeur idéologique que les athlètes n’hésitent pas à utiliser.
Par conséquent, dans Olga, le résultat sportif n’importe en réalité que peu. La véritable performance se trouve ici dans le dépassement de soi, de ses propres barrières, sportives ou idéologiques. Le travail de photographie de Lucie Baudinaud entre en total accord avec ces choix de réalisation et n’hésite jamais à varier les différentes tonalités de températures de couleurs en fonction des ressentis et sentiments, sur l’instant, des différents protagonistes. Authentique long-métrage sur la persévérance et l’affranchissement, le film d’Elie Grappe se dévoile ainsi, peu à peu, tel un hymne au libre arbitre.
Olga de Elie Grappe, avec Anastasia Budiashkina, Sabrina Rubtsova Caterina Barloggio… 1h25
[…] de films traitant de la difficulté sportive individuelle : Moi, Tonya (2017), Slalom (2020), Olga , La rage au ventre (2015)… Au sein de chacun de ces films, le sport n’est en réalité qu’un […]