Class 1984 s’inscrit dans la vague des exploitations grand public. Succès au moment de sa sortie en 1982, le film de Mark L. Lester est avant tout une œuvre visionnaire alors qu’avait lieu 17 ans plus tard la tragique tuerie de Columbine. Un mal-être dans le milieu scolaire à tous les niveaux qu’a su capter le réalisateur.
Andy Norris est un professeur envoyé au lycée Lincoln pour remplacer le prof de musique. Cet ultra-optimiste se frotte à un monde où les élèves passent au portique détecteur de métaux (improbable à l’époque et pourtant c’est devenue presque une norme), où les professeurs portent une arme. Dans cet univers impitoyable, les forces de police sont impuissantes face à un petit groupe d’élèves punks qui font du trafic de drogue dans l’enceinte de l’établissement. Dès le premier jour, les hostilités sont lancées entre Andy qui veut à tout prix exercer son rôle de professeur et la bande menée par la tête brûlée Peter Stegman. Les affrontements se font de plus en plus fréquents et de plus en plus réguliers jusqu’à atteindre un point de non retour autant pour la bande que pour Andy.
Remis dans le contexte actuel, Class 1984 prend une forme encore plus intéressante. Là où les portiques de sécurité se sont démocratisés et alors que Donald Trump propose que tou·tes les professeurs soient armé·es, le film dessine déjà ce que donne le système scolaire quelques années plus tard. Peter Stegman et ses acolytes sèment la terreur. Ils sont jeunes, charismatiques et surtout bourrés de fric. Mark L. Lester point du doigt tout ce qui ne va pas (peut-être en simplifiant un peu trop le propos) allant des parents à l’éducation ultra-laxiste, aux programmes violents montrés en continu à la télévision jusqu’à la direction du lycée qui laisse tout passer autant par désintérêt que par peur. Une situation pesante pour tout le monde et qui se fait le reflet d’un système bancal qui détruit autant les élèves que les professeur·e·s. La relation entre Andy et sa femme se détériore alors que cette dernière a peur pour son mari. Son collègue, poussé à bout, finit par prendre en otage sa classe pris de désespoir après que les animaux de sa classe se sont tous fait sauvagement tuer et dépecer. Un élève se fait agresser au couteau par la bande mais refuse catégoriquement de porter plainte ou de donner un nom par peur de représailles.

C’est dans ce climat anxiogène que le réalisateur déroule son film à un rythme effréné, empêchant le/la spectateur·ice de reprendre son souffle ou de comprendre ce qui est en train de se passer. La colère et la violence sont partout. Mark L. Lester ne se refuse rien, montre tout, de la nudité en passant par la violence et la sexualité. C’est cru et pourtant représentatif d’un certain mal-être : des élèves incompris·es, un corps enseignant qui n’est pas préparé et c’est l’allumette trop près du bidon d’essence. L’escalade de violence se fait à toute vitesse jusqu’à un climax aussi inattendu qu’il est insoutenable. Le charisme et la candeur de Perry King fait un merveilleux duo avec la beauté insolente de Timothy Van Patten. Un jeu du chat et de la souris d’abord plaisant à regarder qui devient angoissant tant l’homme dévoile sa noirceur et sa folie au fur et à mesure. Son final est d’ailleurs à l’image du film, intense, direct et sans possibilité de s’échapper. Malgré toute la bonne volonté du professeur, la mauvaise graine de sa classe reste la mauvaise graine. Reste à prier qu’elle ne vienne pas empoisonner les autres mais rien n’est moins sûr…
Malheureusement visionnaire, Class 1984 est une passionnante analyse d’un système fait de lacunes. C’est le portrait d’une époque qui va mal mais aussi d’un avenir qui n’est guère plus radieux. C’est frontal, excessivement violent, terriblement efficace.
Class 1984 de Mark L. Lester. Avec Perry King, Merrie Lynn Ross, Tim Van Patten… 1h38
Sortie le 29 septembre 1982