Dans les adaptations cinématographiques de Stephen King, il suffit d’un rien pour faire basculer le récit de terreur à quelque chose de ridicule. Il n’y a guère besoin de faire les comptes pour se rendre compte que le maître de l’horreur a vu ses histoires se déverser dans autant de réussites (Carrie version De Palma, It version Muschietti, Simetierre version Lambert) que de ratages (les remakes de Carrie et Simetierre). Fort heureusement, Le bazaar de l’épouvante penche dans le sens positif de la balance Kingienne sur grand écran. Sa ressortie chez Rimini permet de rappeler l’intérêt pour un récit aux bases démoniaques.
Le jeu du film se base sur les rapports marchands entretenus par un mystérieux vendeur et les habitants de Castle Rock. Dans son magasin, tout se trouve, surtout les objets les plus voulus par chacune de ces personnes L’échange se fait moins économique que moral, avec cette promesse d’obtenir la marchandise rêvée en échange d’un simple service. Par cet accord, le récit trouve une ironie noire qui n’en finit pas de peindre le long-métrage par sa tonalité des plus sombres. Il se développe doucement mais sûrement une explosion de toute part, gradation d’un chaos à échelle citadine qui ne peut que laisser des traces, de préférence rouge sang.

La critique matérialiste du film se révèle des plus claires, surtout au vu du rapport de certains objets avec les habitants. On passe de la naïveté enfantine à quelque chose de plus amoral et permettant de mieux ressortir les vices d’idéaux ancrés dans nos différents protagonistes. En ce sens, Max Von Sydow livre une partition parfaite dans la peau de Leland Gaunt, ce vendeur si aimable et honnête au premier abord. Il se révèle quelque chose de discrètement démoniaque dans son regard, avec un charisme qui ne fait que souligner la grandeur de cet acteur, encore plus dans un rôle qui nécessite justement une subtilité dans le jeu pour assurer la crédibilité de sa figure.
En ce sens, on pourrait argumenter que le shérif incarné par le toujours excellent Ed Harris dispose de moins d’espace, comme si l’emprise de Leland se fait également de manière extra diégétique sur la narration. Néanmoins, on oublie rapidement cet aspect par le traitement plutôt acide du récit et sa violence conservant une forme de brutalité tout en soulignant l’ironie du propos. La mise en scène de Fraser Clarke Heston est au service de l’intrigue, sans réelle forme d’explosion visuelle mais sachant cadrer au mieux toute la perte de contrôle de la ville, en particulier dans son dernier tiers.

Pas besoin d’être un grand fan de Stephen King pour (re)voir ce Bazaar de l’épouvante au vu de ses nombreuses qualités, transparaissant encore fortement presque 30 ans après sa sortie. Rimini propose de plus une édition qualitative qui permet de mieux faire ressortir la pertinence du propos du film, sans oublier son lot de contenus additionnels. En ce sens, cet achat se fait bien plus recommandable qu’un investissement dans le magasin d’antiquités de Lelaund Gaunt…
Le bazaar de l’épouvante de Fraser Clarke Heston avec Max Von Sydow, Ed Harris,Bonnie Bedelia,… Disponible chez Rimini depuis le 22 novembre (1h56)