Est-ce que Jérémy Clapin réalisera un doublé Cannes/Annecy ? Nous n’aurons la réponse que demain. En attendant on l’espère fortement car J’ai perdu mon corps est le coup de coeur de ce Festival. En témoigne d’ailleurs une salle en ébullition hier soir après la projection du film dans la Grande Salle de Bonlieu et une demande si importante qu’une séance a été rajoutée. Des signes de bonne augure ?
Update : Le film a gagné le Prix du public et le Cristal.
J’ai perdu mon corps est l’adaptation du livre “Happy Hand” de Guillaume Laurant (également co-scénariste du film) dans lequel une main coupée s’échappe d’un frigo d’une fac de médecine pour retrouver son corps, ici celui de Naoufel, jeune livreur de pizza sans avenir ni famille après que celle-ci soit décédée dans un tragique accident de voiture. Entre temps, Naoufel rencontre Gabrielle. Histoire d’amour, histoire de deuil, poésie… Jérémy Clapin frappe ici un grand coup avec une oeuvre d’une grande maîtrise. Alternant les destins de cette main coupée et de Naoufel, le film ne souffre jamais de temps mort. Encore mieux, il alterne les genres avec une facilité quasiment énervante. Jouant la carte du thriller, de la romance, du drame… J’ai perdu mon corps est véritablement un film sensoriel qui fait appel à nos souvenirs, à notre odorat, notre toucher…

La maîtrise est totale aussi bien dans les scènes parlées entre Naoufel et Gabrielle avec un vrai questionnement sur le destin que les scènes muettes où cette fameuse main entre en jeu. S’incorpore alors une seconde donnée non négligeable qui est celle de la musique. Derrière cette partition se trouve Dan Levy (moitié du groupe The Dø), véritable magicien qui, avec sa partition aux sonorités éléctro, accompagne parfaitement le film et l’emmène par moment dans un cosmos à part, poétique, onirique. Jeux de toucher, jeux de sons, le film utilise les sens pour donner un sens à son film, à la vie de Naoufel, à son destin.

Il y a-t-il quelque chose qui ne relève pas du sublime dans ce film ? On se le demande. En tout cas J’ai perdu mon corps rend un fier hommage à l’animation française et nous prouve – comme s’il fallait encore le prouver d’ailleurs – que l’animation française n’a pas à rougir et qu’elle regorge de talents inventifs. Subtil mélange d’animation 2D, 3D et de rotoscopie (des prises de vues réelles modélisées par la suite en 2D ou 3D), le film fonctionne de par son réalisme et notamment ce travail sur cette main coupée qui prend vie au fur et à mesure du film au point où elle devient une entité à part qui semble presque sentir, ressentir et vivre avec un vrai travail de positionnement qui nous fait croire à certains moments que cette main se comporte comme un humain.
J’ai perdu mon corps est d’une poésie folle, d’une créativité généreuse et est surtout une proposition de cinéma unique dans le paysage du film d’animation. Et honnêtement après avoir rencontré le réalisateur dont l’interview est disponible ici, on a encore plus envie de voir son film récompensé ici à Annecy rien que pour la prise de risque.
J’ai perdu mon corps de Jérémy Clapin. Avec les voix d’Hakim Faris, Victoire du Bois… 1h21
Sortie le 6 novembre
[…] de Cannes, c’est devenu celle aussi du Festival d’Annecy. Pour son premier long-métrage J’ai perdu mon corps, Jérémy Clapin marque d’une empreinte déjà forte le cinéma d’animation français avec une […]