Présenté en Hors-Compétition lors du dernier Festival de Cannes, Stillwater a ouvert la 47ème édition du Festival du Cinéma Américain de Deauville. Matt Damon y campe le rôle de Bill Baker, un américain faisant le voyage de l’Oklahoma jusqu’à Marseille dans le but de voir sa fille, Allison (Abigail Breslin), incarcérée pour meurtre. La jeune femme se dit innocente et a récemment pris connaissance d’un nouvel élément qui pourrait conforter ses dires. Bill, mis à l’écart par la barrière de la langue et l’hostilité de la ville, rencontre Virginie (Camille Cottin), une actrice de théâtre qui l’aide dans la quête de l’innocence de sa fille.
Réalisé par le metteur en scène oscarisé Tom McCarthy, Stillwater se veut être le fruit d’une collaboration fructueuse entre la France et les États-Unis. En ce sens, la sélection du long-métrage au Festival de Deauville suit la logique de la reconduite de la catégorie Fenêtre sur le cinéma français créée en 2020. Ouvrir le festival sur cette association internationale donne ainsi le ton de ce vers quoi celui-ci va pencher sur les prochaines éditions, la présence de films francophones garantissant également la venue des équipes des films.
Cette collaboration se marque cependant davantage, au sein de Stillwater, par la création d’un décalage que d’une alliance. Effectivement Bill Baker, dans la recherche de preuves pour faire innocenter sa fille, joue le rôle du parfait américain évincé par la barrière de la langue ainsi que par l’incapacité apparente de la majorité des français à pouvoir parler anglais. Les clichés du choc des cultures trouvent leur point culminant dans un échange de répliques entre Camille Cottin et Matt Damon, lequel répond, à la remarque agacée « Vous parlez comme un vrai américain ! », un tranchant « Tant mieux, j’en suis un ! ».
Le personnage de Maya, la fille d’Allison, régit à elle seule une énorme partie de ce contraste culturel. Petite fille ne parlant pas anglais, celle-ci devient pourtant au fur et à mesure du film la confidente de Bill. Les deux protagonistes se comprennent non pas par le biais d’un langage commun mais autour d’un sentiment de solitude, Bill étant seul dans une ville lui étant inconnue et Maya subissant les absences récurrentes de sa mère. Même si enfonçant une nouvelle fois la porte ouverte de la confrontation France/Amérique jonchant l’intégralité du film, cette relation de l’adulte à l’enfant lui fournit une forme de puérilité agréable et contraste avec la violence d’autres séquences. Cette correspondance trouvée entre Bill et Maya est par ailleurs, grâce à l’aspect humain qui s’en dégage, la seule relation réellement fonctionnelle du film. Le couple formé à l’écran par Matt Damon et Camille Cottin, même si tous deux fortement impliqués dans le long-métrage, est dénué de réels enjeux, et la relation du père et de sa fille incarcérée, à l’image de ce qu’ils ressentent l’un envers l’autre, a un intérêt variable en fonction de la manière dont sont amenés leurs échanges.

Prévisible sur toute sa longueur, le film parvient cependant à surprendre et se relève parfois plaisant. Cela est notamment du à un montage très dynamique mais toujours lisible ainsi qu’à une réalisation efficace et parvenant à trouver une juste limite dans l’action qu’elle tente d’insuffler. Le message final sur la culpabilité et la présomption d’innocence est cependant trop brouillon et donne au film, dans son vœu d’éviter toute prise de parti, un sentiment d’inaccomplissement. Malgré tout, Stillwater reste un portrait très honnête de la ville de Marseille dont il cherche à filmer le vrai visage sans chercher à le déformer. Personnage à part entière, la cité Phocéenne devient ainsi l’atout majeur du film dans cette caractérisation particulière que porte l’œil du réalisateur américain sur la ville.
Stillwater de Tom McCarthy avec Matt Damon, Camille Cottin, Abigail Breslin…2h20
Sortie le 22 septembre