Coup de coeur de la compétition du FIFIB 2021, Any Day Now s’inscrit comme une œuvre éminemment politique mais qui ne prend jamais le parti d’affronter frontalement le sujet pour mieux nous cueillir.
La famille Mehdipour a quitté l’Iran pour espérer vivre une meilleure vie en Finlande. En attendant la réponse quant à leur demande d’asile, Ramin, sa sœur Donya, sa mère Mahtab et son père Bahman vivent au jour le jour dans un centre pour réfugiés. L’attente est longue mais la famille a réussi à se construire une certaine routine et à se lier d’amitié avec d’autres réfugié·es dans le centre. Tout bascule le jour où iels reçoivent une lettre du Gouvernement, leur demande d’asile est refusée. La famille ne perd cependant pas espoir et opte pour un dernier recours au tribunal. Pendant ce temps, le jeune Ramin, 13 ans, continue de vivre sa vie alors que la rentrée scolaire a eu lieu dans l’espoir de grandir dans ce pays.

Le réalisateur Hamy Ramezan s’inspire de sa propre vie (lui-même a quitté l’Iran avec sa famille pour venir vivre en Finlande où leur demande d’asile a été acceptée) notamment pour les membres qui composent cette drôle de famille. Et dès le départ il nous prend à revers avec un ton qui dénote totalement des films sur la situation des réfugié·es qu’on a l’habitude de voir. On suit tranquillement cette petite famille haute en couleur avec une mère aimante, des enfants heureux·ses d’aller à l’école et surtout un père qui s’avère être le véritable pilier de cette famille. Rien ne semble pouvoir les rendre triste ou en colère à l’image de cette scène où iels se font réprimander par des voisins car ils font trop de bruit alors qu’il est plus de 21h. Qu’à cela ne tienne, iels danseront sans faire de bruit ! Une lettre du Gouvernement arrive pour leur annoncer que leur demande est refusée ? Qu’à cela ne tienne, il reste encore un recours au tribunal ! Cet optimisme donne une aura incroyable au film et à ses personnages si bien qu’on en oublierait presque la menace qui pèse sur eux.
D’ailleurs Ramin oublie bien vite son statut de réfugié. Totalement intégré dans son collège, il se lie d’amitié avec un garçon de sa classe et comme tous les garçons de cet âge tombe amoureux d’une camarade. Le réalisateur déroule son récit par la suite du point de vue de Ramin qui apprend à vivre, à s’amuser de petits riens, à goûter sa première bière… Cette magnifique insouciance vient se briser par moments lorsque la menace n’est pas loin comme lorsque les agent·es de l’immigration débarquent à l’école pour embarquer un de ses camarades (un processus abject malheureusement utilisé en Finlande, pour empêcher les parents de s’échapper, en mettant d’abord en détention les enfants). Le film vient nous assommer pour nous ramener à la réalité dans un final bouleversant tant par son absence de mots que par cette distance qu’il arrive à créer pour éviter de sombrer dans un pathos presque évident.
Any Day Now fait ce que peu de films ont réussi à faire jusque là en empruntant un chemin qui déjoue toutes les attentes du/de la spectateur·ice pour mieux le/la cueillir dans un élan romanesque fort mais jamais larmoyant.
Any Day Now de Hamy Ramezan. Avec Shahab Hosseini, Laura Birn, Muhammed Cangören… 1h22
Sortie le 8 décembre