Marguerite Duras est une femme qui a marqué l’art par ses écrits, ses pièces mais aussi ses films. Un personnage passionnant et complexe qui fascine. Mais ce qui fascine aussi ce sont ses histoires d’amour dont sa dernière avec Yann Andréa, de 38 ans son cadet. Une relation fusionnelle sur laquelle ce dernier a voulu poser des mots avec l’aide de la journaliste Michèle Manceaux. Mais certains textes devraient rester sur le papier.
Michèle Manceaux se rend dans la demeure de Marguerite Duras et son compagnon depuis plus de huit ans, Yann Andréa, à la demande de ce dernier. Installé·es à l’étage, Michèle se met à enregistrer le début d’une longue conversation sur sa relation avec l’écrivaine. Le choix de cette journaliste n’est pas anodin puisqu’elle est une amie proche de Marguerite Duras et est probablement la plus à même de comprendre la relation sans jugement. Malgré le fil conducteur, elle se permet certains digressions et certaines questions très personnelles à laquelle Yann répond, plus ou moins.
Ce qui est censé être séduisant dans ce projet reste la complexité des liens entretenus entre Duras et Andréa. Comment cet étudiant en philosophie et homosexuel de surcroît a-t-il pu tomber sous le charme de l’écrivaine beaucoup plus âgée que lui ? Comment se sont-ils connu·es, aimé·es mais aussi détesté·es ? La réalisatrice Claire Simon colle au texte, beaucoup trop même. Si bien qu’on se retrouve rapidement enfermé·e dans un espèce de train-train quotidien qui se résume à Emmanuelle Devos qui vient, discute avec Swann Arlaud (au phrasé cependant fabuleux qui réussit à retranscrire tout l’amour mais aussi toute sa détresse) et repart dans son chalet. Si le film est ponctué de véritables extraits où l’on aperçoit les traits de personnalités de Marguerite Duras, ça ne suffit pas à faire décoller le long-métrage.

Le plus énervant dans cette histoire, c’est de voir à quel point le potentiel romanesque et théâtral peut être intéressant. Si Claire Simon avait réussi à se détacher un tant soit peu du texte, elle aurait pu approfondir tous ces paradoxes qui ont fait de cette relation quelque chose de compliqué mais également d’unique. La présence de Marguerite Duras qui plane sur l’interview à travers ses réguliers coups de téléphones, comme pour faire savoir qu’elle est là et qu’elle entend tout, une présence autant chaleureuse que pesante pour Yann. En plantant sa caméra dans ce salon, on se retrouve avec un film de plus d’une heure et demie fait de champs et contre-champs constants si bien que même un match de tennis serait plus intéressant.
Un bien joli texte jamais mis en avant dans une mise-en-scène jamais inspirée ou dans une construction narrative totalement linéaire qui donne simplement l’impression d’avoir pris le livre en cours de route… pour l’arrêter également en cours de route.
Vous ne désirez que moi de Claire Simon. Avec Swann Arlaud, Emmanuelle Devos, Christophe Paou… 1h35