Avant de devenir le tâcheron de 2019 avec Hellboy (reboot bruyant et écrit avec des gans de boxe) ou encore Doomsday (film bruyant, écrit avec des gants de boxe mais référencé jusqu’à la moelle épinière), Neil Marshall s’est fait connaître au grand public grâce à The Descent, un pur film d’horreur viscéral.
Juno, Sarah et Beth sont trois amies inséparables qui aiment faire du rafting. Après une journée passée ensemble, Sarah a un accident qui coûte la vie à son mari et à sa fille. Un an plus tard, elle est loin d’avoir fait son deuil. Pour essayer de ressouder le groupe et soutenir leur amie, elles se retrouvent toutes les trois avec Rebecca, Sam et Holly. Direction un chalet des Appaches pour partir en expédition dans une grotte. Après un éboulement, le groupe de jeunes femmes s’enfonce de plus en plus profondément dans la grotte à la recherche d’une sortie lorsqu’elles se rendent compte qu’elles ne sont pas toutes seules et que les lieux sont habités par des créatures avides de sang. Il est désormais question de survie dans un groupe où la sororité va s’effriter petit à petit…
Avec la peur du noir, la claustrophobie est l’une des frayeurs les plus communes. Imaginez-vous coincé dans un espace réduit… auquel on ajoute des créatures sanguinaires. Neil Marshall prend un malin plaisir à nous malmener autant que ses protagonistes. The Descent, c’est surtout un énorme film de gonzesses. Six femmes qui montrent leurs capacités de survie une fois coincées dans cette grotte. Entre Juno la leadeuse, Sam l’intello ou encore Holly la discrète, chaque fille a un rôle bien défini. Ce qui apparaissait donc comme un film sur la sororité et la survie entre filles va rapidement vriller aux règlements de compte, où les personnalités vont s’exacerber.

À l’image d’une société où l’on tente – tant bien que mal – de prôner la sororité, The Descent nous rappelle à quel point tout ceci n’est qu’une vaste fumerie. Qu’on le veuille ou non, lorsque les problèmes pointent le bout de leur nez, c’est du chacun pour soi. Le groupe se sépare dès lors qu’elles se font attaquer par ces créatures d’une violence inouïe. Sans aucune aide extérieure, elles vont devoir faire preuve de courage pour survivre. Mais à partir du moment où il ne doit rester qu’une survivante, l’histoire n’est plus la même. Certaines se soutiennent face à l’ennemi, d’autres veulent s’en sortir coûte que coûte même si cela signifie sacrifier les autres. La descente sera aussi l’occasion pour Sarah de reprendre – le temps d’un instant – le dessus sur la tragédie qu’elle a vécu.
Une autre piste de lecture est tout aussi intéressante à mettre en exergue. D’abord celle de la pression masculine dans la société. Outre le seul protagoniste homme qui meurt dès le début avec une barre en fer enfoncée entre les deux yeux, les créatures qu’on retrouve au fond de la grotte ont un physique très masculin (sans que le film ne l’indique) dans leurs traits de visages et leurs corps. On peut dès lors voir The Descent comme une métaphore de l’oppression masculine qui, malgré les efforts de ces dames pour la contrer, finit irrémédiablement par les séparer et les empêcher de remonter à la surface.
Mais toute cette critique sociale ne serait rien sans ce qui fait le sel de cette œuvre, le jusqu’au-boutisme de Neil Marshall. Dans une ambiance oppressante et poisseuse simplement teintée de vert ou de rouge, The Descent est un cauchemar ensanglanté. Alors que sa première partie s’installe doucement mais sûrement, la brutalité prend le pas, use et abuse de l’hémoglobine. Une effusion tellement assumée qu’elle est réjouissante à voir. Têtes arrachées, fémurs à l’air, intestins dévorés… Le réalisateur signe là un film qui n’a pas peur de sa proposition, assumé jusqu’au bout et aux thèmes sous-jacents tout aussi intéressants à analyser. Une vraie patte et une maîtrise qui malheureusement s’estompe au fur et à mesure.
Cauchemar sous terre où personne ne saura vous entendre, The Descent est un film âpre, sombre où tout espoir de survie est irrémédiablement détruit à l’image de ce final d’une intelligence et d’une audace folle.
The Descent de Neil Marshall. Avec Nathalie Jackson Mendoza, Shauna Macdonald, Myanna Buring… 1h49
Sortie le 12 octobre 2005