Les studios Ghibli sont réputés pour leur qualité, tant sur la narration que sur l’animation. Pourtant, l’une de leurs œuvres semble être en dessous des autres, le téléfilm Je peux entendre l’océan, sorti en 1993.

De quoi ça parle, Je peux entendre l’océan ? Eh bien, de pas grand-chose, c’est tout le problème. Un lycée japonais, un jeune garçon timide, une fille mystérieuse, une romance naissante, et un triangle amoureux. Du vu et du revu donc, déjà lors de la sortie du téléfilm en 1993. Résumons grossièrement l’intrigue : nous suivons ici Taku Morisaki, la trentaine, qui à l’occasion d’un retour vers son village natal se replonge dans ses souvenirs. Le film démarre alors plutôt bien, avec une assez belle scène introductive de flashback à l’aide d’une palette de couleurs moins marquées, et d’un zoom sur un souvenir. Taku se remémore l’époque où lui et son ami Yutaka Matsuno étaient au lycée. Les deux jeunes sont de vrais rebelles, opposés aux décisions de la hiérarchie des professeurs du lycée.
Mais attention, nous ne sommes pas aux États-Unis et les deux ne sont pas James Dean dans La Fureur de vivre. Nous sommes au Japon, les rebelles sont bien propres sur eux, et se contentent d’élever un peu la voix. La vie décidément trop mouvementée de ces deux ados se voit alors perturbée par l’arrivée de la jeune Rikako Muto. Originaire de Tokyo, la voici débarquée dans la province campagnarde du lycée. Elle se montre très vite agaçante, voire arrogante, avec des attitudes vexantes pour les autres élèves. Cela n’empêche pas nos deux compères de s’amouracher pour elle, pour une raison tout à fait incompréhensible (spoiler : elle est mignonne). Cela va bien entendu provoquer quelques frictions entre les deux amis, d’autant que Rikako ne semble s’intéresser qu’à Taku, et l’embarque bien malgré lui dans un voyage vers Tokyo… On se dit que l’aventure démarre enfin, il n’en est en fait rien, et la suite du film est une succession de scènes bien connues de tous les amateurs de fictions japonaises : scène de piscines, de drague gentillette, de combat entre amis, avec un passage obligé par la chambre où deux lycéens timides n’osent pas froisser les draps plus que nécessaire.

Le pire personnage de Ghibli ?
Si l’intrigue ne décolle donc jamais vraiment, les personnages eux, font réagir, surtout Rikako. La lycéenne figure en tête des classements des personnages les plus agaçants dans un Ghibli. C’est bien simple, elle passe l’intégralité du film à harceler le pauvre Taku (attention ça va divulgâcher un peu l’intrigue): elle lui vole son argent, lui vole son lit (ce qui le force à dormir dans une baignoire!), et va même jusqu’à lui coller des baffes ! Le tout avec pour excuse « je suis triste, mes parents divorcent ». Un personnage assez loin de ceux auquel le studio japonais nous a depuis habitué, mais peut-être plus proche d’une certaine réalité : tout le monde n’est pas une héroïne guerrière à sauver le monde, parfois nous sommes juste des êtres humains un peu crispés… Le film y gagne pourtant l’un de ses intérêts majeurs : celui du plaisir sadique lorsque Rikako se prend de justes retours de bâtons.

À voir ou pas, alors ?
Au final, Je peux entendre l’océan divise les fans de Ghibli, et c’est tout naturel. La plupart lui reprochent, à raison, une représentation trop classique, trop sage, sans rebondissement majeur ni intrigue franchement fascinante, ni même de sous-texte métaphorique, le tout en format téléfilm d’1h12. D’autres en revanche, semblent trouver au film un aspect presque nostalgique. Après tout, c’est cela la vraie vie lycéenne, une succession de scènes banales sans grand intérêt. Plus qu’une histoire, Je peux entendre l’océan semble donc être un film d’ambiance. Celle du lycée, du Japon, des amourettes de jeunesse. Celle d’un certain ennui aussi, pour ceux qui n’ont pas gardé un si bon souvenir de leurs années adolescentes.
Je peux entendre l’océan, de Tomomi Mochizuki. Avec les voix de Nubuo Tomita, Toshihiko Seki, Kae Araki…1h12. Film de 1993, disponible sur Netflix depuis le 1er février 2020