Folie, exubérance même, des qualificatifs en réalité bien faibles quand on s’attaque à Alex de la Iglesia. Après l’excellent Balada Triste qui nous malmène dans une chasse à l’homme complètement folle et savoureuse, jouant avec l’univers du cirque – c’est bien simple, on avait pas pris un tel pied depuis Santa Sangre de Jodorowsky, malgré le changement drastique de registre -, le réalisateur du remarquable Crime Farpait décide de s’attaquer au fantastique, et de dépeindre des sorcières bien dangereuses….mais non sans humour !
On peut trouver dans Les Sorcières de Zugarramurdi un grand air d’Une nuit en enfer avec ces braqueurs pas bien loquaces, qui en tentant de s’enfuir d’un casse quant à lui bien foiré se retrouvent dans un village peuplé de sorcières. Sauf qu’en terme d’imagerie, on pourrait presque dire que Robert Rodriguez est un gentil enfant de chœur. De la Iglesia nous sert une explosion de son univers trash, bordélique, qui se fout des limites budgétaires au point d’offrir un bestiaire tantôt sublimé, tantôt moche à souhait, mais qui pète de partout. Il y joue le jeu de l’opposition Homme/Femme, en confrontant des voyous dépassés par leurs compagnes qu’ils ne comprennent pas à une bande de sorcières souhaitant offrir aux femmes leur revanche tant méritée. À l’instar de Nos Chers Voisins ou de bien d’autres métrages de l’Espagnol, l’autel du divertissement regorge de problématiques sociales, amenant leur lot de messages en second plan.

Au milieu des habitué·ess du réalisateur, la sublime Carmen Maura, qui n’est au final pas si éloignée de ses personnages de femmes révoltées et revanchardes qu’elle interprète déjà à la perfection chez Almodovar. Le plaisir évident se contraste avec cet aspect brouillon, que De La Iglesia traîne sur chacun de ses films tellement il veut en mettre. Beaucoup trop, tout le temps, celui qui est un éternel adolescent ne plaît pas à tout le monde, mais offre à ses amateur·ices un nouveau bain de jouvence revigorant et généreux. On implore celui dont le dernier effort est la version espagnole de cette désastreuse comédie qui chez nous a donné Le Jeu de repartir dans ses délires, qu’on suivra avec passion quels que soient leurs défauts.
Les Sorcières de Zugarramurdi, d’Alex De La Iglesia. Avec Carmen Maura, Mario Casas, Carolina Bang …
Sorti le 8 janvier 2014
Texte datant de 2014, remanié pour être publié dans nos pages.