On en avait déjà parlé en long et en large dans le dernier numéro de Désolé j’ai ciné (https://www.yumpu.com/fr/document/read/62569124/desole-jai-cine-10/78) mais il est bon de rappeler à quel point les studios Laika on réussit à s’imposer dans le paysage de l’animation cinématographique déjà bien occupé par les mastodons Pixar ou Dreamworks dès 2009 avec Coraline. Entre temps ils nous ont proposé trois autres long-métrages dont le magnifique et poétique Kubo et l’armure magique il y a trois ans. Véritables maîtres de l’art de la stop-motion, les studios Laika assoient un peu plus leur réputation avec leur prochain film Monsieur Link qui est probablement leur projet le plus abouti à ce jour.
Considéré comme un outsider par ses pairs, l’explorateur Sir Lionel Frost veut leur prouver qu’il est digne d’appartenir à leur club. Il se lance alors dans une ultime quête, sur les traces de l’ancêtre de l’humain. Une fois découvert, il s’avère que “Monsieur Link”, comme Sir Lionel Frost le surnomme par la suite, est une créature gigantesque aussi développée que l’humain et capable de parler. Ce dernier fait appel à l’explorateur pour l’emmener sur les traces de ses parents éloignés à travers les montagnes. Accompagnés de l’exploratrice Adelina Fortnight qui est la seule à posséder la carte les permettant d’atteindre leur destination, les trois compères vont chacun vivre un voyage initiatique bourré d’humour et de péripéties.
Chris Butler est déjà un adepte puisque ce dernier a réalisé L’Etrange pouvoir de Norman et a co-écrit le scénario de Kubo et l’armure magique. Pour Monsieur Link, Travis Knight lui a de nouveau fait confiance en lui laissant réalisation et scénario. D’ailleurs la seule petite chose qu’on pourrait reprocher au film – et encore c’est pour chercher la petite bête mais vous savez qu’on aime chercher la petite bête ici – ce sont ses quelques facilités de scénario qui rendent certaines scènes prévisibles – mais pas moins efficaces attention -. Cependant le tout est rapidement contrebalancer par la machine Laika qui réussit à nous éblouir visuellement à chaque fois.
Plus grand, plus impressionnant, plus détaillé
Je vous invite rapidement à mon TED Talk : Pour avoir réalisé un court-métrage en stop-motion, je me rends compte à quel point il faut de la patience et de la minutie.
Et lorsqu’on voit Monsieur Link, on peut aisément deviner le travail titanesque qui se cache derrière. Les studios Laika ont une telle maîtrise de la stop-motion qu’elle en devient presque indétectable tant le résultat final est d’une fluidité bluffante. Et loin de se contenter de ça, le film est bourré de détails que ce soit dans le bureau de Sir Lionel Frost ou l’incroyable scène dans les montagnes sur le pont de glace. Monsieur Link est d’une générosité incroyablement vivifiante. Rien n’est jamais laissé au hasard, les travaux d’échelles effectués pour accentuer la grandeur des décors est sublime. Visuellement, Monsieur Link est indéniablement le plus réussi, n’hésitant pas à croise les techniques d’animation pour offrir un résultat fourni et impressionnant à l’écran.
Et même si on a pointé du doigt ses petites facilités scénaristiques, on ne peut indubitablement pas lui retirer sa générosité au niveau des dialogues, des péripéties et des gags qui alimentent tout le film. Chaque blague vise juste, fait rire à bon escient et Monsieur Link devient en un claquement doigt un personnage drôlement attachant. Et enfin sans rien vous spoiler du film – car ce serait définitivement gâcher le plaisir de ce petit détail -, Monsieur Link se permet de transmettre un très beau message concernant la quête identitaire (au sens propre comme au sens figuré) au travers d’une scène, d’une phrase, d’un mot. On ne vous dira pas lequel mais vous aussi vous allez sourire devant cette scène et honnêtement vu le contexte actuel, ce genre d’aparté est plus qu’apprécié – et osé ! -.
Avec Monsieur Link, les studios Laika offre une nouvelle fois un divertissement généreux et drôle. Une nouvelle preuve que Laika peut se targuer d’être aussi – voire plus oui on ose – qualitatif que ses concurrents. Un film XXL qu’il ne faudrait absolument pas bouder lors de sa sortie, on vous a prévenu.
Monsieur Link de Chris Butler. Avec les voix d’Eric Judor, Thierry Lhermitte… 1h35
Sortie le 17 avril