L’histoire d’un cochon volant, embarqué sur son hydravion rouge dans les cieux des eaux de l’Adriatique. L’un des plus beaux Ghibli, souvent délaissé.
Certains d’entre vous ont sans doute connu l’époque des bandes annonce au début des VHS. L’une d’entre elles laissait un souvenir plus mémorable que les autres. Impossible d’oublier son style visuel, sa musique et surtout ses personnages atypiques. Le héros n’était autre qu’un homme au visage de cochon, ou un cochon habillé comme un homme, aviateur survolant les mers à bord d’un bel avion rouge, poursuivi par des pirates de l’air. Le tout sentait bon l’aventure, et avait un ton bien plus adulte que tous les autres « dessins animés » de l’époque. Ce film, c’est Porco Rosso.
Ghibli en Italie

Porco Rosso signifie le porc rouge en italien. L’intrigue se déroule en effet dans l’Adriatique, bras de mer méditerranéen situé entre l’Italie et la Croatie. Ce « cochon rouge », c’est Marco, aviateur d’élite autrefois pilote dans l’armée de l’air italienne. L’histoire évolue dans un univers mi-fictif mi-réel, le contexte étant celui de l’après Première Guerre mondiale, où le gouvernement prend un tournant de plus en plus fasciste en Italie. C’est aussi et surtout l’époque d’une croissance exponentielle de l’aviation, avec une place importante accordée aux hydravions. Dès lors, de nombreux pirates de l’air en profitent pour attaquer par surprise des bateaux de croisière et en dérober les cargaisons. Là où d’autres auraient fait un simple drame ou film d’aventure, Ghibli mélange les genres avec saveur. On retrouve donc une ambiance presque enfantine, avec des pirates finalement au bon fond, et où d’ailleurs personne n’est vraiment mauvais. Les enfants s’amusent, et si l’on est pas au niveau d’un Ponyo sur la falaise, il faut avouer que Porco Rosso tente plus l’attendrissement que le drame. À l’exception de quelques scènes, dont une magnifique de « paradis des avions », l’une des meilleures tout Ghibli confondus.
Combats aériens virtuoses

Porco Rosso développe une intrigue constamment baignée dans le mystère, où chaque détail compte. Ici, nul passage d’exposition sur les origines de chaque personnage. Ainsi même le « sortilège » à l’origine de la tête de cochon de Marco ne sera jamais expliqué, et cela peut laisser sur le côté ceux pour qui l’intrigue doit primer sur l’action. Pourtant, quelle action ! Entre les mers d’un bleu lumineux, les nuages aux couleurs chatoyantes et le rouge de son avion, Porco Rosso est un chef d’œuvre de couleurs et de clarté. Les hydravions virevoltent dans les airs, se tirent dessus à la mitrailleuse dans des combats épiques, tandis que leurs pilotes montrent tantôt des visages confiants, souvent des têtes effarées lorsque la situation tourne à leur désavantage. Hayao Miyasaki montre ici tout son talent ainsi que celui de ses équipes, bien des années avant qu’il ne reparle d’aviation pour Le Vent se lève. Le tout agrémenté de la musique de son compositeur traditionnel, Joe Hisaishi, qui s’amuse avec des sonorités légères et semblables à des parades de village. Alors certes, on peut reprocher au film d’avoir un peu trop simplifié son scénario, de cacher sous des sourires une époque de récession cruelle, ou d’avoir des personnages féminins caricaturaux (en tout cas à nos yeux contemporains), cela n’empêche pas d’y voir une grande œuvre artistique, poétique. Et de réécouter à sa guise, le temps des cerises.
Porco Rosso, d’Hayao Miyazaki. Avec les voix de Shuichiro Moriyama, Akemi Okamura, Akio Otsuka… 1h33
Film de 1992, sorti en France le 21 juin 1995
[…] est omniprésent dans sa filmographie, de manière explicite ou non, du Château Dans Le Ciel à Porco Rosso. Le Vent se lève est une manière pour lui d’en expliquer l’origine, la filiation. […]