Diffusée entre 2005 et 2008, Avatar, le dernier maître de l’air est probablement l’une des meilleures séries d’animation que le petit écran a pu nous offrir. À travers les aventures d’un groupe d’adolescent·es essayant de se construire dans un monde en perpétuel changement, la série explore au fil de ses trois saisons des thématiques fortes et intergénérationnelles grâce à une construction narrative parfaitement menée et des personnages complexes et attachants.
L’histoire se déroule dans un monde fictif divisé entre quatre grandes entités : la nation du Feu, les nomades de l’Air, les tribus de l’Eau et le royaume de la Terre. L’Avatar, seul être vivant capable de maîtriser les quatre éléments, a disparu depuis un siècle, laissant le champ libre à la nation du Feu pour envahir ses voisins. Mais alors que la nation du Feu cherche à tout prix à retrouver les traces de l’Avatar pour le détruire une bonne fois pour toute, deux adolescent·es découvrent un enfant prisonnier d’un glacier : il s’appelle Aang et est l’Avatar.

Toute le génie narratif de la série pourrait se résumer à la qualité d’écriture de ses personnages, en particulier Zuko et Azula, enfants du seigneur du Feu. Scarifié et banni par son père pour l’avoir contredit lors d’un conseil de guerre à l’âge de 13 ans (oui, oui), Zuko est présenté au début de la série comme un antagoniste violent et cherchant à tout prix à retrouver son honneur perdu. Azula, sa sœur, est au contraire la favorite de son père, aussi cruelle et manipulatrice que lui. La psychologie et l’évolution de ces deux personnages se construisent en parallèle, centrées autour des abus physiques et émotionnels que leur père leur a fait subir. Zuko et Azula cherchent à tout prix la validation de leur père, toutes leurs actions sont motivées par ce but ultime sauf que leurs chemins vers cette validation vont radicalement s’opposer. Contrairement à sa sœur, Zuko a un bon fond et est capable de rédemption. Azula reste bloquée dans un passé traumatique marqué par les abus de son père alors que Zuko trouve en lui la force d’échapper à cette emprise pour s’émanciper et se construire sa propre identité. Tous les personnages affrontent intérieurement le même dilemme : se conformer à ce que le monde attend d’eux ou prendre contrôle de leur vie. À travers eux, on explore le concept d’identité et de moralité dans l’adversité. Toute l’histoire tourne autour d’une balance nécessaire, par le biais évidemment de l’Avatar mais également pour les autres personnages.
L’univers en lui-même est admirablement bien construit et cohérent de bout en bout, avec des vrais enjeux politiques crédibles. On ressent bien à l’écran les différences culturelles entre les différents royaumes, une différence très marquée, notamment au niveau des combats. Orchestrés presque à la manière d’une danse, les affrontements permettent surtout de mettre en valeur les pouvoirs des différents personnages. Couplé à une animation très fluide qui élève chaque mouvement en le rendant plus gracieux et marquant, l’audience parvient très bien à saisir la violence de chaque coup. On pense notamment à l’Agni Kai entre Azula et Zuko dans la dernière saison, une des scènes les plus marquantes de toute la série.

La musique est également un élément intéressant qui vient appuyer la mise en scène à plusieurs reprises dans la série. Reprenons l’exemple de l’Agni Kai d’Azula et Zuko : sur le papier, l’affrontement s’annonce épique et spectaculaire et, visuellement, il l’est. La musique vient cependant ajouter une autre perspective à la scène. Pas de fanfare ou de chants élogieux, les compositeurs ont choisi d’utiliser des notes de violons très calmes et sans envolées prodigieuses, créant un ensemble triste et mélancolique. On ramène l’audience à la réalité : ce duel n’a rien d’héroïque. Ce n’est qu’un affrontement à mort entre un frère et une sœur à la relation complètement brisée par leur père. Peu importe l’issue, c’est une scène dramatique et non glorieuse, la musique est là pour le rappeler.
Avatar, le dernier maître de l’air est l’un de ces rares programmes qui parvient à briller sur tous les plans possibles et imaginables. L’alliance entre une narration et une écriture de personnage frôlant la perfection ainsi qu’une animation splendide fait des merveilles. Combiné à un réel propos sur la construction d’identité et de valeurs, on obtient une série intemporelle qui n’a pas pris une ride depuis plus de 15 ans et qui continue à être aussi pertinente pour une audience moderne.
Avatar, le dernier maître de l’air de Michael Dante DiMartino et Bryan Konietzko. Avec les voix de Zach Tyler, Mae Whitman, Jack de Sena. 3 saisons de 20-21 épisodes de 25 minutes.