Betty est une jeune mère de deux enfants qui partage une maison avec dix autres personnes (la plupart des mères avec leurs enfants) dans la banlieue de Colorado Springs. Vivant sous le seuil de pauvreté, elle s’accroche comme elle peut pour offrir à ses enfants une vie décente. Malheureusement, ses démons la rattrapent régulièrement, et elle préfère dépenser le peu d’argent qu’elle a en substances illicites pour oublier le temps d’un instant sa vie misérable.

La cinéaste danoise Eva Marie Rødbro pose sa caméra dans cette petite maison pour suivre Betty et quelques-unes de ses colocataires qui peinent toutes à joindre les deux bouts. Compliqué pour Betty lorsque sa vie se résume à drogues, dettes et peur de tout perdre. La figure masculine est rarement évoquée, seulement en périphérie. Le documentaire laisse d’ailleurs pas mal de zones d’ombres (la nature des revenus de Betty, ce qui lui est arrivée dans le passé, à elle et son compagnon etc…) pour offrir un portrait presque solaire malgré toutes les embûches. Rødbro arrive à rester à bonne distance pour ne pas tomber dans le misérabilisme propice à ce sujet tout en supprimant les barrières du documentaire pour prôner l’entraide féminine et la compassion.
C’est aussi donner un autre visage à ces délaissées du système qui ont cru à l’American dream avant de s’y casser les dents. Betty est ce visage, celui de quelqu’un qui ne baisse pas les bras, qui essaie de trouver de la joie même dans les choses les plus simples de la vie malgré cette peur constante de mal faire et de tout perdre. L’autre lueur d’espoir de ce documentaire c’est bien Jade, la fille de Betty. Haute de trois pommes, la petite ne se rend pas encore compte des difficultés du monde adulte qui l’entoure et la caméra se plait à la suivre par moments dans ses divagations, ses balades à vélo et ses parties de cache-cache. Les nuages sont nombreux et ne cesseront jamais mais tant que des petits bouts comme Jade sont là pour montrer la lumière et s’amuser sous la pluie, tout ne semble pas encore perdu.
Mélange entre un reportage MTV (le documentaire a ce grain de cassette VHS assez surprenant) et The Florida Project, I love you I miss you I hope I see you before I die est une plongée touchante parmi la classe la plus pauvre qui ne cesse de s’accrocher pour (sur)vivre.
I love you I miss you I hope I see you before I die de Eva Marie Rødbro. 1h16