À y regarder de plus près, le Festival de Deauville a toujours mis un point d’honneur à mettre en avant les femmes, les films de et faits par elles. La dernière édition se souvient encore d’American Woman ou Swallow mais revenons en 2015 où était présenté en sélection officielle I Smile Back, le portrait sans concessions d’une mère de famille désemparée qui n’a plus que la drogue comme seul refuge.
Laney Brooks a tout de la mère de famille épanouie et heureuse. Une belle maison dans une banlieue aisée, un brillant mari qui l’aime et deux beaux enfants qu’elle affectionne par dessus tout. Mais derrière ce joli portrait de la parfaite petite famille américaine se cachent de terribles secrets. Laney Brooks n’est pas la femme qu’elle veut faire croire à tout le monde. Elle a ses démons, ses peurs et essaie d’atténuer tout ça en faisant les mauvais choix : tromper son mari avec le mari de sa meilleure amie, l’alcool, la drogue, les médicaments… Toutes ces tentatives désespérées pour essayer d’aller mieux sont vaines. Il ne lui reste alors plus qu’une chance de se rattraper de ses erreurs. Mais il arrive que certaines blessures soient bien trop grandes pour pouvoir être pansées.

Dès les premières minutes, la caméra s’accroche à Laney et son quotidien, sa maison bien rangée, son mari qui joue au basket avec ses enfants. Mais derrière cette silhouette frêle se dessine un visage torturé. Torturé par le temps qui passe (Laney contemple son corps et son visage comme pour constater les dégâts du temps sur elle) et effrayé : effrayé qu’il puisse arriver quelque chose à ses enfants, effrayé de perdre son mari, effrayé par l’emprise qu’ont la drogue et l’alcool sur elle. La spirale infernale qui enferme Laney nous mène avec elle dans cette folie destructrice. Le questionnement sur la mort et l’amour est au cœur du film. Laney refuse d’avoir un chien qui mourra d’ici quelques années et refuse de voir ses enfants tristes, Laney refuse de croire que son amant l’aime, Laney refuse d’aimer son mari car « à quoi bon aimer ? ». Rapidement, ce mal-être s’explique par un passé douloureux avec un père absent et un frère avec qui elle n’est pas tellement proche. Un semblant de répit semble se dessiner lorsque Laney met des mots sur ses maux mais les belles choses ne durent jamais.
Baigné dans une atmosphère lugubre et froide, I Smile Back s’évertue à dépeindre une femme qui pourrait très bien être notre mère, notre femme, notre sœur ou notre voisine. Que se cache-t-il derrière ces sourires de façade ? Une femme accro à la drogue, un mari infidèle, un sourire commercial… Sans forcément donner raison à son personnage principal, le réalisateur Adam Salky nous montre comment la peur peut pousser n’importe qui à faire des choix déraisonnés. I Smile Back peut se reposer sur la prestation spectaculaire de Sarah Silverman qui donne à Laney ce visage fragile, constamment sur le fil des choses dont l’amour qui se dégage n’a d’égal que sa folie destructrice.
Un portrait qui nous montre également que tout ne finit pas forcément bien et que souvent, les démons reprennent le dessus sans que l’on ne puisse y faire quelque chose.
I Smile Back de Adam Salky. Avec Sarah Silverman, Josh Charles… 1h25.
Sortie en e-cinema le 3 janvier