Ce film aura longtemps traîné dans les cartons (pour finalement sortir sur Prime Video) alors qu’outre-Atlantique Tom Hanks était nommé aux Oscars comme meilleur second rôle. Une nomination qui aurait pu nous paraître étonnante au vu du titre laissant deviner un biopic classique. Que nenni, L’Extraordinaire Mr. Rogers est probablement LE film dont on a besoin en cette période trouble pour nous rappeler que l’amour, l’empathie et la bienveillance sont des vertus qui manquent beaucoup trop à ce monde.
Fred Rogers est un animateur télé connu aux Etats-Unis. En effet, entre 1968 et 2001 il a animé tous les jours une émission destinée aux plus jeunes dans laquelle il interagit et discute avec des enfants de sujets de leur âge (le premier jour à l’école ou des sujets plus graves comme la mort, la maladie ou le divorce). Mais alors pourquoi réaliser un film sur ce personnage près de dix-sept ans après sa mort ? Le titre porte alors à confusion. Car si Mr Rogers est bel et bien extraordinaire, le film se concentre avant tout sur la relation qu’il va nouer avec le journaliste d’Esquire, Lloyd Vogel. Ce dernier est sommé par sa rédactrice en chef de réaliser un portrait sur l’animateur vedette. Une tâche qu’il prend sans grand enthousiasme car selon lui il n’y a rien de bien intéressant à raconter, lui préférant largement les portraits épineux dans lesquels il peut dénoncer les torts et travers des personnalités.
Invité sur le plateau de son émission, Lloyd est de plus en plus persuadé que Fred Rogers cache quelque chose. Après tout, comment quelqu’un peut être aussi gentil et bienveillant envers tout le monde ? Une sensation instinctive devenue logique dans une société où la gentillesse semble plus une tare qu’autre chose. En continuant de creuser, Lloyd découvrira malgré lui que oui, Fred Rogers est bel et bien l’incarnation même de l’empathie et la bienveillance.

Au-delà de cette rencontre, Lloyd vit une situation familière assez compliquée. Tout juste père, sa sœur se marie pour la énième fois et son père débarque dans sa vie après des années d’absence. Une rancœur qui dure depuis des années – ce dernier ayant quitté la mère de Lloyd alors qu’elle était malade – et qui explose à son retour. Le contraste devient alors flagrant entre un Fred Rogers qui ne voit le mal chez personne et un Lloyd Vogel aigri et en colère. La rencontre des deux va permettre à ce dernier de s’apaiser, de comprendre sa colère, de la canaliser et surtout de pardonner. Alors que Vogel va essayer de titiller Rogers en lui posant des questions épineuses sur sa vie privée, Rogers les esquive avec une facilité déconcertante pour pousser Vogel à se confier. Et c’est là que réside toute la beauté du film. Cet inconnu vu par des millions d’américains mais que finalement personne ne connaît s’avère être un membre de la famille à part entière. Quelqu’un à qui il semble facile de se confier et à qui on s’attache immédiatement.
Le choix de Tom Hanks pour incarner cette légende de la télévision est plus qu’évident. Il offre à son personnage toute l’épaisseur et la douceur demandée. Acteur ancré dans toutes les mémoires, qu’elles soient cinéphiles ou grand public, Tom Hanks est un acteur qui aurait pu être Fred Rogers, ampli d’empathie et de bienveillance envers tout le monde si bien qu’on comprend qu’il ait reçu une nomination aux Oscars pour son rôle. Son tandem avec Matthew Rhys fonctionne à merveille, l’alchimie est présente et Rhys réussi à s’imposer face à ce monstre du cinéma pour devenir complémentaire.
Sans jamais tomber dans la mièvrerie de la bienveillance, Marielle Heller réussit à réaliser un biopic qui sort des clous pour nous montrer que plus que la vie d’un homme, ce sont son oeuvre et ses valeurs qui se répercutent sur tous ceux qu’il rencontre. Des valeurs nécessaires qu’on a tendance à oublier.
L’Extraordinaire Mr. Rogers de Marielle Heller. Avec Tom Hanks, Matthew Rhys, Susan Kelechi Watson… 1h49
Disponible sur prime Video