Dans une petite ville d’Amérique, Ann Walton est une jeune comptable appréciée de tou·tes et bientôt mariée à Jim Owens. Un soir, Ann est victime d’un viol qui la laisse totalement traumatisée. Incapable de reprendre le cours de sa vie, elle fuit sa ville pour essayer de reconstruire quelque chose ailleurs, mais les traumatismes sont toujours présents et compliquent son intégration dans cette nouvelle ville.
Pour contextualiser, le film d’Ida Lupino est sorti en 1950 alors que le code Hays (appliqué entre 1934 et 1966) bat son plein et pousse les réalisateur·ices à trouver des subterfuges pour passer entre les mailles du filet. Évidemment toute question de viol – ou plus généralement de sexualité – est prohibée à l’écran. C’est ainsi qu’Outrage ne fait que suggérer tout ce qui s’est passé. Lorsqu’Ann subit son viol, on ne voit strictement rien, le mot n’est même pas évoqué. C’est dans ces moments qu’on admire toute la maestria de la réalisatrice qui amène intelligemment son moment critique. Des ruelles sombres, une jeune femme seule et un homme qui la suit. Rien n’est anodin, la tension se crée. Ann court à travers les rues pour échapper à cet homme, tambourinant aux portes sans jamais trouver d’aide, se cachant entre les camions avant de tomber nez à nez avec son ravisseur. Ann tombe dans les pommes mais on devine aisément ce qui s’est passé lorsqu’elle rentre chez elle, titubant et incapable d’aligner deux mots devant ses parents.

Le coupable du viol devient très vite une donnée secondaire puisqu’il s’agit de suivre Ann et sa reconstruction. Lorsqu’elle décide de retourner au travail, elle croit faire face à un monde hostile qui la dévisage, la juge et parle derrière son dos. Tout lui rappelle cette agression : un homme qui vient lui parler, le motif des barrières (endroit où elle a été agressée) qui revient sans cesse, le bruit du bout des doigts qui tapent contre la table, lui rappelant les pas de son agresseur. Or, ce sont évidemment ses traumatismes qui lui font croire tout ça. Sa paranoïa est telle qu’elle ressent le besoin de partir sans prévenir personne, quitte à annuler son mariage avec Jim à qui elle dit qu’elle ne veut plus qu’il la touche (une réaction normale qu’il refuse d’écouter, lui suppliant de se marier avec elle de suite pour partir refaire leur vie au loin). Nouvelle ville, nouvelle femme qui tente de s’acclimater tout en cachant son passé mais malheureusement, enfouir un traumatisme n’est jamais une bonne solution, si bien que tout ceci la pousse à commettre l’irréparable. Ann est celle qui porte l’étiquette du bourreau, celle dont on a peur et celle qu’on juge. Cette affaire se conclue sur un monologue du prêtre de la ville qui pointe avec justesse les problèmes de la société, ce qu’elle engrange et comment elle se déleste de toute responsabilité.
Outrage est dénué de toute superficialité au découpage, au scénario ou à la mise en scène. Pourtant le film résonne grandement lorsqu’il s’agit de cette femme, perdue dans une société qu’elle ne reconnaît plus et dont elle a peur. Ida Lupino s’attarde sur ce chemin personnel à mener pour guérir d’un traumatisme et retourner à une vie normale.
Outrage, d’Ida Lupino. Avec Mala Powers, Robert Clarke, Tod Andrews…1h15
Film de 1950, ressortie en salles le 9 septembre 2020
[…] de proposer une thématique Ida Lupino en ce mois de novembre. Nous vous avions déjà parlé de Outrage qui avait eu droit à une très belle ressortie en salle en septembre 2020 et aujourd’hui est […]
[…] devenir une figure régulière de nos envies d’écriture. Nous vous avions déjà parlé de Outrage qui avait eu droit à une très belle ressortie en salle en septembre 2020 et aujourd’hui est […]
[…] avons déjà abordé la filmographie d’Ida Lupino pour évoquer les excellents Outrage et Le voyage de la peur. Deux œuvres différentes dans leur approche mais qui ont un cœur commun, […]