[CRITIQUE] Adolescentes, portrait d’une jeunesse en manque de repères

Qu’est-ce que l’adolescence dans les années 2010 ? Une question tout à fait banale qui acquiert toute sa complexité une fois qu’on s’y penche plus longuement. Loin de vouloir en faire le tour, c’est tout de même ce que propose Adolescentes, réalisé par Sébastien Lifshitz, en suivant deux ado de Brive-la-Gaillarde, Anaïs et Emma, de leurs 13 ans à leurs 18 ans.

Ce projet, qui parait fou et peut-être insurmontable au départ, se révèle être une véritable réussite. À travers le portrait de deux jeunes filles, à la fois différentes et complices, car amies d’enfance, c’est aussi le portrait d’une génération qui est construit et peint tout au long du film. On assiste à des événements banals mais incontournables de la vie – les premiers amours, la première fois, les conflits avec les parents, l’orientation, l’obtention du bac, le deuil – mais aussi ceux que nous avons pu vivre en tant que société, comme les attentats de janvier et novembre 2015 ou les élections présidentielles de 2017. Ce sont deux tranches de vie, deux points de vue sur le monde, deux trajectoires que montre le film, et donc deux jeunes filles qui deviennent des femmes adultes, gagnent leur émancipation, s’affirment face à un monde en crise.

Ad Vitam

Cette dualité permet au film de se nuancer lui-même à chaque instant, ne serait-ce que parce qu’Emma est issue d’une famille des classes moyennes, Anaïs des classes populaires. Il montre à quel point cette différence est capitale pour la nature du chemin que ces deux filles construisent, mais aussi pour leurs goûts, leurs envies, leurs rêves. Et pourtant, avec tout ce qui les sépare à l’arrivée de l’âge adulte, le film semble proposer de dépasser ces « petites » différences pour tendre à quelque chose d’universel et de plus grand, avec l’espoir que malgré tout ceci, elles continueront de se côtoyer.

Ce qui les rassemble, c’est peut-être aussi ce qui caractérise cette génération d’adolescents, et même de jeunes adultes, des années 2010 : le doute et la peur du lendemain. Anaïs le dit avec ses mots « Puis tu sais, quand on se verra, on aura grave changé et tout tu vois. […] C’est angoissant, je trouve, le futur, en vrai« . Le constat est grave mais sincère.

Adolescentes de Sébastien Lifshitz
Documentaire – 2h15
Sorti le 9 septembre 2020

1 Commentaire
  • […] Lifshitz nous avait déjà ébloui il y a quelques mois avec son très réussi Adolescentes. Il sévit de nouveau sur Arte avec un documentaire ô combien important : Petite fille. Une […]

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