Chained et Beloved , actuellement au cinéma, sont les deux faces d’une même pièce, pensée comme un triptyque qui sera complété d’ici septembre par Stripped. À travers ces trois films, ce sont plusieurs personnages et leurs destinées qui se croisent pour dépeindre les complexités des relations autant amoureuses que familiales et plus simplement, humaines.
Rashi et Avigail sont en couple et s’apprêtent à être parents. Tout semble aller pour le mieux, elle est infirmière dans le service gériatrie de l’hôpital et lui est policier. Les deux semblent avoir pour vocation d’aider et de protéger autrui. Un malheureux incident impliquant Rashi va mettre à mal le couple. Les tensions se multiplient, le ton monte et on assiste à la déchéance d’un couple jusqu’à son dénouement tragique. Le premier volet Chained se concentre sur Rashi. On le découvre dans son élément, à traquer et arrêter les pires espèces de la ville (on tombe coup sur coup sur un père violent puis un autre qui, n’ayant pas supporté le divorce, s’est suicidé avec ses enfants). Le ton est donné, il semble terriblement sombre mais nous voilà rassurés lorsqu’on le découvre avec sa femme. Attentionné, drôle, dévoué, cet espèce de gros nounours semble, du moins en apparence, mener une vie parfaite. Prenant son travail très à cœur et ne supportant pas l’injustice, Rashi va se retrouver mis à pied lorsqu’une interpellation envers des dealers présumés se passe mal, notamment à cause de son excès de zèle et une fouille qui va beaucoup trop loin. Une enquête est ouverte, tout comme le gouffre dans lequel il va tomber. Il va se refermer et c’est Avigail qui en fera les frais la première.

De son côté, Beloved se dirige vers le quotidien d’Avigail. Jeune femme qui a perdu le sourire, emprisonnée dans un mariage qui ne lui convient plus et une adolescente en pleine crise. C’est au contact de nouvelles amies qu’elle va retrouver un sens à sa vie, une renaissance (d’ailleurs le titre VO du film est Reborn) avant l’inéluctable chute qu’on a pu voir dans le précédent volet. À travers la parole et une thérapie qui passe par le bien-être, nous sommes invités à en découvrir un peu plus sur Avigail et la période qu’elle traverse mais le film nous fait également découvrir de nouveaux personnages qui viendront ensuite clore la trilogie.
Chained et Beloved se complètement parfaitement (logique pour un diptyque-future trilogie) mais il est assez intéressant de voir à quel point les deux films sont diamétralement opposés. Les deux titres donnent déjà un indice sur le ton donné à chacun d’eux. Pour Chained et Rashi, une ambiance oppressante s’installe dès les premières minutes. Une ombre menaçante plane sur le couple, la sentence va tomber. Quand ? On ne le sait jamais et c’est ce qui est terrifiant. Par moments, le réalisateur nous esquisse ce qui pourrait être la fin du couple par des scènes tendues, violentes… La tension grimpe à mesure que Rashi sombre.

Beloved et Avigail s’embarquent sur un tout autre registre. Se déroulant sur la même temporalité que Chained, on découvre ainsi de nouveaux moments entre elle et Rashi ainsi que ceux passés avec ses amies. Ces femmes prennent alors une place capitale dans le récit. Un discours qui s’inscrit à 200% dans la sororité, à l’image des séances entre filles pour se reconnecter à la nature où elles chantent, rigolent, dansent, se peignent dessus et semblent bien loin des problèmes quotidiens. La force de Yaron Shani est de ne jamais en faire trop dans son récit. Énormément de pudeur se dégage des scènes de grandes émotions (celles où Avigail craque sont bouleversantes, Stav Almagor est la révélation de ce film) tout comme le cheminement de ces différentes femmes qui, petit à petit, vont renaître pour se donner une seconde chance. Le récit s’éloigne cependant assez rapidement d’Avigail (même si on la retrouve dans des séquences charnières) pour devenir un récit bien plus large qui donne la part belle aux femmes. Dans le premier volet où l’homme avait une place prépondérante, ici on découvre des femmes de toutes les origines aux parcours différents qui vivent encore sous le joug patriarcal que ce soit un mari, un père ou l’homme de manière plus générale. Il n’est pas forcément nécessaire de voir les deux films pour en saisir la beauté mais il est fortement conseillé de les voir dans l’ordre (Chained puis Beloved) pour se prendre de plein fouet toute la puissance du propos.
En toute sobriété , Chained et Beloved sont deux films qui se complètent par leurs différences -ce qui fait véritablement la force de ces œuvres – entre la colère brute de l’homme d’une part et la tendre sensibilité de la femme de l’autre. Reste à savoir comment cette trilogie sera conclue mais au vu des deux premiers opus, il est certain que Yaron Shani saura donner son point final en bonne et due forme.
Chained et Beloved de Yaron Shani. Avec Stav Almagor, Eran Naim, Ori Shani… 1h52 et 1h48
En salles le 8 et le 15 juillet
[…] jusqu’à nous rappeler une autre épreuve difficile, celle de Yaroon Shani et de son éprouvant Chained. Il ne suffit que de ces quelques gestes, dont la caméra parvient à épouser la fausse […]