Il y a des sujets au cinéma qui sont sensibles et qui, s’ils sont mal écrits, peuvent vite devenir vulgaires ou caricaturaux. La comédie française et la caricature est une liaison dangereuse qui ne cesse ne nous prouver encore et encore qu’on a du chemin à faire. Quand le projet Forte a émergé, beaucoup de signaux étaient au rouge mais il arrive qu’on ait de bonnes surprises, et ce film en fait définitivement partie.
Nour travaille à la compta d’une salle de sport. Son mec l’a quitté pour une femme plus “féminine” et plus mince, elle est charmée par son collègue de travail qui ne la remarque pas – excepté pour la féliciter sur ses tableurs parfaits -, sa mère est sur son dos h24 et ses amis sont adorables mais tout aussi paumés qu’elle. Lorsque son amie Sissi donne des cours de Pole Dance, Nour se dit que c’est peut-être le moment de se lancer dans quelque chose de nouveau et de sexy pour se changer les idées et pouvoir séduire. Sauf que faire de la Pole Dance n’est pas une question de physique… mais de mental.
Une jeune fille en surpoids qui veut faire de la Pole Dance… franchement tout était là pour qu’on soit effrayé par la teneur de ce film et d’autant plus lorsqu’on voit son titre. Pourtant Forte est tout sauf à quoi on s’attendait. C’est d’abord un film sur l’acceptation de soi. Un film sur une jeune femme dans une société conditionnée par ce qu’on voit dans les magazines mais aussi par les hommes à la recherche de toujours plus beau, plus féminin, plus sexy à conquérir. Une prise de conscience qui se fait petit à petit à travers son ex petit-ami mais également ses amis du club de football ou encore son collègue qui ne voit en elle qu’une chargée de comptabilité incroyable. Alors quand elle découvre la Pole Dance grâce à son amie professeur, elle se lance ce pari fou. D’abord à tâtons avec énormément de second degré jusqu’à ce qu’elle se mette à aimer ça et à se découvrir en tant que femme. Initialement pour séduire les hommes, il faudra un dernier élément déclencheur pour qu’elle comprenne que tout ce cheminement accompli est avant tout pour elle.

La Pole Dance, parlons-en d’ailleurs. À l’image de Queens qui banalisait le strip-tease, Forte montre une autre facette de la Pole Dance qui n’est finalement qu’un sport comme les autres. À travers la caméra de Katia Lewkowicz, les scènes dans le club ne sont jamais vulgaires ni même le grand final traité avec une grande intelligence pour une morale finalement très simple : s’accepter tel que l’on est, que ce soit en sweat et bonnet ou perché sur des talons hauts ou en petite tenue.
Le film tient sur les épaules de Melha Bedia aussi drôle que spontanée, toujours à sortir la vanne bien placée et qui est absolument solaire et touchante lorsqu’elle plonge dans ses incertitudes de jeune femme mal dans sa peau. Les dynamiques avec ses amis joués par Alison Wheeler et Bastien Ughetto fonctionnent et ne sont absolument pas en reste dans l’histoire, que ce soit Adèle, jeune mère célibataire en quête de l’homme de sa vie ou Steph, qui doute de son orientation sexuelle. Sans compter sur une Valérie Lemercier pleine d’humour et d’amour envers Nour qui agit comme un ange gardien ou une petite voix pour l’aider à aller de l’avant.
Jolie surprise pleine d’humanité, d’humour et de regard positif, Forte est un beau message pour tous ceux et celles qui cherchent à s’accepter sans aucun tabou que ce soit à travers la Pole Dance, les rencontres ou les expériences. Des personnages forts qui ne le savent pas encore et qui prouvent qu’on peut l’être dans tous les sens du terme. Un film qui aurait mérité de trouver son public en salles mais qu’on vous conseille vivement de soutenir sur Amazon Prime Video.
Forte de Katia Lewkowicz. Avec Melha Bedia, Valérie Lemercier, Alison Wheeler… 1h35
Disponible sur Amazon Prime Video