Alors que Netflix se targue déjà de lui proposer une suite, dont la réputation nourrit quelques appréhensions – on vous en parlera peut-être, mais rien n’est dit -, l’occasion est de faire un retour sur The Babysitter, qui démontre qu’avec un peu d’huile de coude, même un réalisateur pataud tel que McG peut balancer du fun décomplexé à l’écran.
The Babysitter ne va pas avoir la prétention de s’éloigner des poncifs, ni même de les détourner. À la manière d’un Happy Birthdead, la trame semi-sérieuse en moins, il va plutôt s’évertuer à en jouer, et le fait plutôt bien. Un héros, Cole, cliché du gosse maltraité à l’école, manquant ouvertement d’assurance, s’enfuit dans la pop-culture pour conserver son innocence. Il est accompagné dans ses fantasmes imaginatifs par Bee, sa baby-sitter, autre fantasme quant à lui bien réel, celui de la blonde fatale, inaccessible, qui lui démontre qu’être un geek, c’est quand même assez cool, et qui va l’aider à combattre ses bullies, tant en lui apprenant à se défendre – note à nous-mêmes, les couilles, ça marche toujours – qu’en intervenant elle-même. Bee est cool, Bee le regarde tel qu’il est et l’aime, bref, Bee est parfaite. Mais peut-être pas tant.

Que se passe-t-il lorsque les enfants sont couchés, et que les baby-sitters attendent patiemment le retour des parents ? Attendez, reformulons. Que se passe-t-il lorsque les enfants sont couchés après avoir bu une bonne rasade de bibine sensée les assommer pour la nuit ? Curiosité de Cole oblige – on aurait bien dit méfiance, mais il aura fallu que le gosse bien naïf se fasse méchamment secouer par une copine bien plus alerte pour s’interroger -, la gorgée alcoolisée tendue par Bee n’ira pas dans son gosier ce soir. Bien éveillé, le marmot va vérifier si, comme le cliché le suppose, Bee ramène son copain à la Morphée tombée pour une petite séance olé-olé. Encore moins farouche qu’annoncée, la baby-sitter ne ramène pas un partenaire mais une ribambelle d’autres jeunes adultes en rut, pour qui le jeu de la bouteille n’a aucun secret. L’innocence de Cole va-t-elle disparaître avec la vision d’une orgie sexuelle débordant d’intervenants ? On aurait bien répondu oui, mais les lames coulent, un crâne se fend, et c’est l’orgie, sanglante cette fois-ci, qui débute.
Cole assiste donc à un meurtre – un rituel sataniste pour être précis -, et comprend qu’il est la prochaine âme au menu du jour. La lutte pour la survie va être sans foi ni loi, et pour illustrer le chaos ambiant face à ce gosse plongé dans l’incompréhension qui va devenir un adulte en une demi-nuit chrono, McG se lâche. La maison devient un terrain de jeu propice à l’amusement, où chaque pièce devient un piège, chaque meuble une arme, et on mêle l’horreur au home invasion, un Maman J’ai Raté L’avion version Freddie X : Cette Fois Il Bouffe Ses Griffes. La caméra est elle aussi un jouet : l’espace nous apparaît comme un amoncellement de niveaux que Cole doit traverser avant d’aller affronter chaque boss, où chaque arrêt sur image accentuant l’aspect graphique du délire semble comme un écran de chargement. Level up garanti pour le bambin, qui récupère du “pex” émotionnel et des points de maturité à chaque niveau franchi.
On s’est souvent amusé, comme on l’a mentionné dans notre retour sur La Maison De Cire, du caractère idiot des protagonistes des teen horror movies, dont les choix rendent souvent hilares. Inversement oblige, Cole a pour lui d’être un petit malin face à une tripotée de benêts que le film n’épargne pas. De la cheerleader au quaterback, tout y passe, chacun plus bêta que le précédent. Est alors dressé un portrait de la jeunesse américaine avec tous ses travers, à la fois investie d’une quête de superficialité absolue mais surtout manipulée par des desseins bien plus obscurs. Tapie dans l’ombre et observant la boucherie en calculant vers quel camp basculer selon l’issue, Bee est l’antagoniste idéale, n’hésitant pas à sacrifier ses sbires et n’opérant que pour sa seule survie. Ses tentatives de meurtre pourraient presque représenter un passage nécessaire à Cole pour s’affirmer, rejeter -littéralement ? – ses démons et passer à l’âge adulte, la montrant comme une accompagnatrice givrée mais nécessaire à l’évolution du jeune garçon. Elle représente donc une partition de choix pour Samara Weaving, qui peut jouer sur les deux tableaux et se délecte du rôle autant qu’elle nous régale à chaque instant, devenant instantanément une nouvelle reine de l’horreur que nous espérons voir briller encore.
The Babysitter surprend et amuse. Une fresque bon enfant qui se joue des codes de l’horreur survivaliste tout en s’y incluant avec intelligence, qui ne va pas s’avancer en réflexion sur le genre et ses futurs affluents mais qui montre qu’avec maîtrise, l’éclate est au rendez-vous. McG retrouve ce qui faisait son sel dans Charlie’s Angels, de l’action décérébrée vouée au divertissement, le cringe en moins. De la part de celui qui a pondu par la suite Terminator Renaissance et Target, on peut s’estimer heureux.
The Babysitter, de McG. Avec Samara Weaving, Judah Lewis, Bella Thorne… 1h25
Film original Netflix, disponible depuis le 13 octobre 2017