Quand on pense à Ghibli, les premiers mots qui nous vient le plus souvent à l’esprit sont poésie, douceur, innocence, femmes aussi quand on voit de grandes héroïnes comme Mononoké, Kiki ou Chihiro. Et bien Pompoko vient vous balayer tout ça d’un revers de sa main pour poser ses couilles sur la table… au sens propre.
Jusqu’au 20e siècle, les Tanukis (des espèces de ratons laveurs aux pouvoirs magiques) cohabitaient avec les paysans en paix, les uns dans leurs forêts et les autres dans leurs champs mais la situation se tend lorsque la ville s’agrandit et que la forêt disparaît petit à petit. Avec un habitat devenu trop étroit, les Tanukis se divisent en deux groupes et se font la guerre afin de conserver leur bout de territoire. Finalement conscients de l’absurdité de cette situation, les chefs de clan décident d’unir leurs forces pour exterminer l’humain qui continue d’étendre son territoire. Mais comme les Tanukis ne font pas comme les autres, ils mettent en place un plan sur cinq ans pour étudier les comportements des humains et développer de leur côté leur pouvoir de transformation pour ensuite les effrayer et les faire fuir. Reste à savoir si cette stratégie sera payante.

Alors que Takahata s’amusait avec son coup de crayon dans Mes voisins les Yamada, le réalisateur s’offre une nouvelle toile blanche pour y créer une galerie de créatures aussi improbables que loufoques. Chefs de file de ce conte, les Tanukis sont des animaux qui ressemblent à des ratons laveurs mais qui ont la capacité de se transformer en… à peu près tout. À cela s’ajoute cette fâcheuse tendance à vouloir transformer leurs couilles principalement mais on y reviendra. Derrière ces animaux hauts en couleur, c’est une vision beaucoup plus grave et sérieuse qui se dessine. On retrouve toujours cette dualité entre un chef qui veut faire preuve de violence pour s’imposer tandis que le second préfère la réflexion et la discussion. Ce qui nous offre de bien jolies scènes qui tiennent toujours un discours sérieux avant d’être rapidement contrebalancées par un personnage beaucoup plus léger qui nous rappelle à quel point ces petites créatures sont de nature adorables et que c’est l’urbanisation qui les pousse dans leurs derniers retranchements. Le film offre également une dimension dramatique dans sa dernière partie lorsque la fin se fait inéluctable et tragique pour les Tanakis incapables de s’adapter à cette urbanisation et l’égoïsme intrinsèque à la société.
S’il y a bien une chose à laquelle on ne s’attendait pas, c’est cette tranche de rigolade qu’on se prend en pleine poire sans prévenir. Il faut dire qu’il est bien improbable de voir un jour dans un Ghibli un personnage déclarer : “Vous voyez ce tapis ? Et bien c’est la peau de mes roubignolles” avant de le voir rétracter ce tapis pour retourner bien en place entre ses deux pattes. D’ailleurs des roubignolles on en verra très souvent et sous toutes leurs formes que ce soit un tapis, une voile de bateau ou bien même une grenouille, oui, oui. De quoi offrir des scènes ubuesques qui dénotent du sérieux du film sans pour autant empiéter ou discréditer le discours.
Pompoko est aussi étonnant qu’il est attachant. On pourrait cependant regretter quelques longueurs et un film qui aurait mérité d’être un poil raccourci mais comment ne pas tomber amoureux de ces petites boules de poils (on parle bien de l’animal et non pas ce qu’ils ont entre les pattes, on vous rassure) ?
Pompoko de Isao Takahata. 1h59
Film de 1994, sorti le 18 janvier 2006