Voilà bien longtemps qu’un film n’a pas autant fait parler de lui et il faut dire que les bruits tout autour sont aussi intrigants qu’antinomiques. D’un côté vous avez ceux en larmes qui prêchent pour le film en criant sur tous les toits qu’il est indispensable, le meilleur de l’année et touti quanti… et de l’autre vous avez l’équipe qui supplie que ce massacre s’arrête, le pire de l’année, un nanar absolu. Difficile alors de s’y retrouver et de comprendre le pourquoi du comment. Du coup on s’est penché dessus pour vous, à nos risques et périls il faut bien l’avouer.
Le cinéma turc se fait très rare au cinéma et pourtant il nous a prouvé qu’il savait proposer de belles choses : en témoigne Winter Sleep (Palme d’Or du Festival de Cannes 2014) ou plus récemment Sibel, Qui a tué Lady Winsley ? Bref, ce petit cinéma qui ne paie pas forcément de mine a de quoi proposer quelque chose avec ce 7. Kogustaki Mucize (ne comptez pas sur nous pour ré-écrire plusieurs fois le titre par contre) d’autant plus que son histoire a tout ce qu’il faut pour plaire au plus grand nombre. Adapté du film coréen Miracle in Cell No. 7, il raconte le combat d’un homme handicapé mental accusé et condamné à mort pour la mort d’une petite fille. De sa cellule et surtout aidé par ses compagnons de galère, Memo va devoir prouver son innocence pour éviter la pendaison alors que dehors sa grand-mère et sa fille accompagnées de la maîtresse de cette dernière vont aussi tout faire pour dévoiler la vérité.
Alors est-ce le désastre de cette année 2020 ? Non… Enfin pas totalement mais quand même un peu beaucoup soyons honnêtes. Le film ne cumule pas que des défauts, loin de là. Aras Bulut Iynemli tient le rôle de ce père totalement rejeté par son village et constamment traité de fou par les enfants comme par les parents, et l’acteur arrive à insuffler une belle humanité à ce personnage qu’on ne peut décemment pas détester tant son annihilation du monde et des gens qui l’entourent est touchante de naïveté à l’image de cette scène où un de ses co-détenus se fait attaquer au couteau et qu’il s’interpose quitte à se faire poignarder. Sans conteste le point fort du film…. et le seul en fait.

À part ça rien ne va. Tout est prévisible de A à Z, le métrage suit un schéma pré-construit si bien qu’on sait déjà comment ça va finir. Ce qui nous enlève forcément toute “surprise” mais comme si ce n’était pas suffisant, 7. Kogustaki Mucize plonge pieds et poings liés dans un pathos totalement indigeste. La situation déjà bien misérabiliste (mais efficace) n’avait pas besoin de tous ces artifices pour fonctionner et nous émouvoir. Sauf que visiblement la production a obtenu budget illimité pour l’orchestre symphonique alors on nous en a mis à toutes les sauces. Du violon par-ci, du piano par-là, des voix lyriques pour aggraver les situations… Vous pensiez que c’était tout ? Eh bien non, le massacre des oreilles est régulièrement agrémenté par un massacre tout aussi visuel entre ses plans lancinants au ralenti digne du meilleur épisode d’Alerte à Malibu et un surjeu assez général (mention spéciale à la scène où le père retrouve sa fille morte où ils ont réussi à cumuler ralentis, musique triste au violon et hurlements, bingo !).
Alors on peut comprendre qu’en ces temps un brin compliqués de confinement on ait envie d’histoires joyeuses et de happy ending. Que les mélodrames ont un effet cathartique puisqu’en se préoccupant du malheur des autres on finit par réévaluer sa propre situation en se disant que c’est pas si grave mais est-on obligé de faire toute abstraction de technicité ? Non. Parce que oui 7. Kogustaki Mucize est mielleux, tendre, touchant mais à trop vouloir faire fondre un marshmallow il finit par dégouliner et c’est exactement ce qui s’est passé ici (et en plus ça dure 2h12).
7. Kogustaki Mucize de Mehmet Ada Öztekin. Avec Aras Bulut ?ynemli, Nisa Sofiya Aksongur, Deniz Baysal… 2h12
Disponible sur Netflix