Des peintres il y en a des millions, des peintres reconnus des milliers mais rares sont les peintres ayant connu le succès de leur vivant. Fernando Botero peut se targuer d’être l’un des rares à, en plus d’avoir une carrière prolifique, être reconnu par le grand public et le monde de l’art comme l’un des plus grands artistes colombiens. Le documentaire Botero retrace ainsi toutes les œuvres mais également les épreuves qui ont jalonné la vie de l’homme désormais âgé de 87 ans et qui n’a pourtant rien perdu de sa gouaille.
Fernando Botero est un peintre absolument passionnant, que ce soit au niveau de ses œuvres que de sa vie personnelle. Premier artiste à avoir été invité à exposer le long des Champs-Elysées en 1992, peintre ayant le plus de livres le concernant à ce jour (selon un intervenant dans le film), le style Botero est inimitable en plus d’être immédiatement identifiable. Avec ses formes rondes, généreuses, voluptueuses et foncièrement exagérées, Botero n’a pas de suite convaincu le public et peine parfois encore à convaincre. C’est là que réside l’intelligence de ce documentaire : celle de donner la parole à ses détracteurs et éviter ainsi de faire tomber le film dans une ode subjective à l’artiste. Le réalisateur Don Millar n’a d’ailleurs pas choisi les avis les plus mesurés puisque Rosalind Krauss – un membre de l’Université d’arts et d’archéologie de Columbia – décrit le travail de Botera comme “horrible” et compare ses statues avec le Pillsbury Doughboy (mascotte de la Pillsbury Company aux États-Unis). Un avis peut-être pas forcément nécessaire mais plus qu’intéressant à inclure.

Outre un documentaire sur l’artiste, c’est également – et peut-être avant tout – un documentaire sur l’homme. Un homme colombien qui a tout quitté pour passer du temps en Europe puis à New York pour essayer de percer avec son art et réussir alors que personne ne le prédestinait à une telle carrière. L’un des chapitres les plus intéressants et touchants est celui concernant la mort d’un de ses fils écrasé par une voiture alors qu’il était encore tout jeune. Ce traumatisme – comme chez beaucoup d’artistes – s’est traduit par un deuil à travers l’art et dans ce cas précis, les œuvres qui ont suivi cette tragédie sont assez époustouflantes et réussissent à traduire une douleur qu’il est assez rare de voir et de ressentir en peinture.
Botero est un documentaire extrêmement plaisant à regarder autant pour ceux qui apprécient son travail que pour ceux qui s’intéressent à l’art de manière plus générale. Artiste complet au style saisissant et original, sa générosité artistique n’a d’égale que les épreuves qu’il a traversées pour réussir. Et il est remarquable de voir qu’aujourd’hui de tels documentaires sur l’art puissent exister et être projeté sur grand écran afin de permettre au plus grand nombre d’admirer de nombreuses œuvres jusque dans leurs moindres détails.
Botero de Don Millar. 1h22
Sortie le 29 janvier