Georges est une star de cinéma vieillissante qui a constamment besoin d’être assisté. Quand son assistant devenu avec le temps un proche doit s’absenter quelques semaines pour un décès dans sa famille, il donne le relai à une de ses connaissances. Aïssa, lutteuse et agente de sécurité. Malgré le courant électrique entre ces deux-là, quelque chose de plus profond se noue au fil des jours.
Pour un premier long-métrage, Constance Meyer peut se targuer d’avoir à l’affiche l’un des plus grands monstres du cinéma français. La collaboration entre elleux remonte déjà à quelques années puisqu’il avait participé à son court-métrage Frank-Etienne vers la béatitude en 2012. Mais pour faire face à un monstre comme Gérard Depardieu il faut être capable de mettre en face de lui une actrice avec assez de charisme et de répondant pour ne pas se laisser submerger et le laisser bouffer tout l’écran. On se rend compte que Déborah Lukumena est peut-être l’une des rares personnes capable d’être à la hauteur d’un Depardieu. Celle qu’on a découverte dans Divines a fait du chemin depuis avec des choix de films toujours aussi judicieux et celui-là ne semble pas déroger à la règle.

D’un côté on a Georges, star de cinéma qui a vieilli et pris de la bedaine en plus de faire considérablement baisser son capital sympathie. Aigri par la vie, n’ayant visiblement plus de contacts avec sa famille, il est censé travailler sur un nouveau film mais reste toujours autant ingérable entre son refus de prendre des cours d’escrime et celui d’écouter les directives de l’équipe du film. De l’autre côté, Aïssa, jeune femme indépendante et travailleuse qui excelle autant dans la lutte que dans son travail d’agente de sécurité mais qui souffre d’une certaine solitude entre un travail “d’homme” où on lui rappelle constamment son statut et une “relation” amoureuse un brin chaotique avec un collègue qui ne semble finalement guère l’aimer. Deux personnages un peu seul·e·s et un peu brisé·e·s qui se rencontrent et se frictionnent immédiatement. De quoi offrir au spectateurs des moments assez drôles d’autant plus que Georges est Gérard Depardieu. L’acteur offre un portrait intimiste qui brouille la frontière entre personne et personnage. L’auto-dérision est de mise lorsqu’il balance des punchlines bien senties dignes d’un grand Depardieu entre “La France sans viande n’est pas la France” ou encore “Putain d’écolos”. Et à côté de ça, Déborah Lukumena réussit à s’imposer et à faire vivre son personnage avec tout autant de justesse et de délicatesse. Le signe qu’une grande actrice continue de croître sous nos yeux.
Derrière cet humour se cache une véritable fracture. Quelque chose de beaucoup plus triste et mélancolique se dessine lorsque Georges titille la mort sans pour autant la vouloir. Derrière la robustesse de ces corps, c’est aussi la fragilité humaine, la fatigue, le besoin d’aimer et d’être aimé.
Malgré quelques facilités scénaristiques propres à un premier long-métrage, Constance Meyer nous propose une parenthèse drôle et touchante, peut-être même un portrait plus approfondi de Gérard Depardieu qui brille tout autant que sa partenaire de jeu Déborah Lukumena dans un film qui veut se laisser porter au gré des paroles et des actions.
Robuste de Constance Meyer. Avec Gérard Depardieu, Déborah Lukumena, Lucas Mortier… 1h35