Cinquante ans nous séparent du massacre de Sharon Tate par la Manson Family, date-clé qui a ébranlé le tout Hollywood. Une date anniversaire qui fait également remonter une fascination macabre pour ce moment où des hippies perdu·es se sont fait·es entraîner vers la criminalité. Quelques mois après la mort de leur gourou, le sujet redevient d’actualité, et après la sortie de Once Upon A Time In Hollywood, beaucoup de gens s’intriguent sur la réalité autour de ce culte. Si on est loin du documentaire, Charlie Says offre une retranscription de l’horreur humaine qui a opéré à la fin des années 60.
Deux narrations entremêlées s’offrent à nous, chacune du point de vue d’une des trois victimes principales de Charles Manson, à savoir ses propres adeptes. On les voit lors de l’incarcération après la fameuse nuit du « Helter Skelter », enfermées à l’isolement, persuadées que ‘Charlie’ va venir les chercher pour continuer à parfaire son œuvre. Au travers des discussions avec une assistante sociale tentant de les ramener à la raison, leurs explications quant à leur état nous entraînent vers des flash-backs, tous se passant au ranch, nous montrant alors les relations entretenues avec le gourou, ses méthodes d’endoctrinement, les passions qu’il arrive à créer autour de lui. Mary Harron, qui nous avait déjà apporté le grinçant Patrick Bateman dans American Psycho, arrive dans sa collaboration avec Matt Smith à offrir une description assez précise de qui était Charles Manson. Celleux qui ont vu documentaires ou autre documents d’archives vont ressentir l’effroi une fois encore face à la folie humaine du personnage.

Le climat est lourd. L’idée est de réussir à retranscrire la menace qui a pesé sur ces filles durant leurs mois de tombée névrotique, et Mary Harron n’hésite pas à en faire beaucoup, souvent trop. D’autant qu’en divisant sa narration en deux arcs distincts, les passages de discussion en prison, qui imagent la déconstruction de leurs convictions pour revenir à la raison sont relayés au second plan. Si les passages dans le ranch démontrent avec justesse la folie de Charles Manson, ses accès de colère, ses propos absolument incroyables mais qui fonctionnaient par une force incompréhensible, ils ne servent malheureusement pas le propos. En préférant à la présence de Charles Manson une ombre fantomatique, illustrée uniquement par le récit de ces femmes sur le chemin de la repentance, Charlie Says perd en force évocatrice. Ça ne retire en rien la force des passages en questions, qui apportent une explication au mystère tournant autour du bonhomme, mais ça place le film dans un entre-deux constant, qui peine à trouver son ton et son équilibre.

Dommage tant les deux arcs sont intéressants pris séparément. La violence des flashbacks rend le tout grinçant, quand la deuxième partie s’axe sur la douceur, la poésie autour de ces personnages foncièrement bons qui sont submergés par leurs mauvais choix. Charlie Says reste un exercice intéressant, qui rappelle un fait divers trouble, sur lequel nous n’aurons jamais toutes les clés de compréhension.
Charlie Says de Mary Harron. Avec Matt Smith, Merritt Wever, Hannah Murray… 1h44
Sortie le 25 mars en DVD/VOD