S’il y a des films, dont le scénario est issu de la Black List, qui ont réussi à percer sur grand écran (Slumdog Millionnaire, The Revenant,etc.), d’autres auraient mieux fait de rester à leur place. C’est le cas de I.S.S, écrit par Nick Shafir, qui tente de nous plonger dans une Guerre Froide moderne nichée à des milliers de kilomètres de notre chère planète.
Un carton-titre dévoile brièvement l’histoire de la Station spatiale internationale (ISS), fondée il y a des décennies comme symbole de la collaboration entre les gouvernements américain et russe. Aujourd’hui, l’ISS est principalement un centre de recherche dédié aux avancées en médecine, technologie et exploration spatiale, en permanence habitée par une équipe mixte d’astronautes américains et russes. Alors que six scientifiques, trois de chaque nationalité, se voient confier une mission médicale consistant à trouver un remède à une maladie, la guerre éclate sur Terre entre leurs pays respectifs. Face au déchirement de leurs deux nations, chaque équipe a pour ordre de prendre le contrôle de la station par tous les moyens.
I.S.S tente tant bien que mal de s’inspirer de films comme Gravity ou encore Alien dans sa gestion de la tension en ratant constamment le coche. Si la découverte de la station spatiale et de son quotidien du point de vue de Kira est revigorante grâce au jeu d’Ariana DeBose qui essaie de se dépatouiller dans ce foutoir, Gabriela Cowperthwaite ne fait jamais rien de ses personnages ni même de la situation. La première partie qui suit tranquillement le quotidien des astronautes n’a rien de bien passionnant, à croire même que tout le monde s’emmerde en gravitation. La caractérisation de l’équipage se limite au seul point de vue de Kira : Kira dort, Kira apprend à quoi sert les 230 boutons sur le console, Kira mange… Aucun autre personnage ne trouve le temps ni l’espace de se développer pour qu’on ait un tant soit peu d’empathie pour elleux. Pire encore, lorsqu’arrive le véritable enjeu du film, la réalisatrice semble avoir quitté le vaisseau.
Échec du lancement
Si l’on peut encore accepter que la première partie prenne son temps et choisisse de faire transparaître la sensation d’ennui et de redondance que peuvent connaître les astronautes, il est plus difficile de comprendre les choix faits à partir du moment où la Terre part (littéralement) en feu. Cet élément perturbateur n’a même pas l’effet d’un pet dans l’eau tant les effets spéciaux n’arrivent jamais à suivre la cadence. Ça sent le fond vert à des années lumières et ça n’a même pas la trempe d’un mauvais film catastrophe. Les escapades spatiales ressemblent à un film fait par des enfants avec leurs Playmobil et la tension n’a d’égale que le respect pour les femmes d’un festival qui a invité Luc Besson.
Le tout est froid, notamment parce que le film ne réussit jamais à créer l’angoisse provoquée par la mission donnée à chacune des équipes. Les petites magouilles et tentatives de meurtres pour arriver à leurs fins ne sont jamais intéressantes ni même bien filmées. Aucunes intentions dans la caméra ni un tant soit peu de chorégraphie lorsque deux personnages s’entretuent en apesanteur. Cowperthwaite n’utilise pas les décors ou la physique à son avantage pour servir son propos. Malgré la gravité de la situation, les actes de trahison et d’auto-sabotage au sein de l’équipage sont étonnamment dénués d’émotion, entravés par une romance à la Roméo et Juliette complètement superflue qui surgit de manière comique et inopinée.
Le seul point de vue américain adopté par la cinéaste et son scénariste parasitent toute tentative de commentaire politique, de sorte tout manque cruellement de nuance : les États-Unis sont gentils, la Russie est méchante. En plus de jouer de facilités et d’un stéréotype de l’intuition féminine qui sauve tout le monde sans qu’on comprenne réellement comment ou pourquoi. Les réserves d’oxygène tombent vite à sec, en même temps que notre intérêt pour le film, ce dernier n’arrivant jamais à exploiter pleinement le poids de ses prémices menaçants et de ses enjeux vitaux. Finalement le désastre I.S.S est à l’image de ses sous-titres pas terminés lors de sa projection au Festival de Deauville : catastrophiques.
I.S.S écrit par Nick Shafir. Réalisé par Gabriela Cowperthwaite. Avec Ariana DeBose, Chris Messina, Pilou Asbæk… 1h33