Si cet été fait comme à chaque fois la part belle aux blockbusters, le cinéma français n’hésite pas à nous proposer d’autres choses plus osées. Pas toujours totalement réussies mais faites avec une certaine sincérité qui fait du bien. Après le succès surprise du film de Mélanie Auffret Les petites victoires, la société de distribution Zinc continue de creuser le filon des récits feel-good au fin fond de la campagne avec Super-bourrés.
C’est la dernière journée avant la fin du lycée pour le duo inséparable formé par Janus et Sam. Afin de participer à la grande fête organisée par l’élève populaire du bahut, iels sont missionné·es pour acheter des bouteilles d’alcool. Un quiproquo entraîne les deux ados dans une course contre la montre pour amener à temps de l’alcool à la fête. Alors que tout espoir semble perdu, la cave du père de Janus est peut-être leur porte de sortie.

Gamin·es bourré·es, émancipé·es
Bastien Milheau nous plonge dans un petit village mené par une mairesse qui fait la guerre à l’alcool après que bon nombre d’accidents provoqués par des habitant·es aient eu lieu sous l’emprise de l’alcool. Une privation qui est loin de plaire au village composé majoritairement de personnes âgées portées sur la bouteille – seul petit plaisir qui leur reste dans leur patelin coupé de tout. Dès la scène d’introduction le réalisateur nous présente une galerie de personnages rustres, qui n’ont pas l’air franchement vifs d’esprit mais dégagent quelque chose de très attendrissant, jouant sur les clichés sans se moquer d’eux. La caméra nous présente ensuite Janus et Sam, nos deux adolescent·es, et ne les lâche plus. Leurs caractères opposés fait leur force. Sam vit au jour le jour, croquant la vie à pleine dent car elle sait pertinemment que son destin dans l’exploitation de son père est déjà tout tracé. Janus est plus réservé, secrètement amoureux de l’anglaise du lycée et prêt à quitter sa cambrousse pour une nouvelle vie à Paris, futur confidentiel qu’il n’a pas annoncé à sa meilleure amie. Ce road trip à la recherche du breuvage sacré sera l’occasion parfaite pour les deux de grandir et se dire au revoir.
Donne-leur la bouteille
Le film s’empare des codes de plusieurs genres (coming of age, road trip mais également le conte) pour dépeindre son histoire et installer ses enjeux. Des enjeux qui peuvent paraître futile aux premiers abords mais essentiels pour Janus et Sam et qui, plus largement, s’inscrivent dans l’incarnation du terroir. Ici l’alcool n’est pas seulement vecteur de beuveries mais aussi de liens familiaux. Janus apprend à découvrir son défunt père par cette distillerie cachée dans la cave, et retrouve également son grand-père, interprété par Jean Lassalle, ici pour expliquer la tradition des bouilleurs de cru. Une séquence un poil embarrassante d’ailleurs, tant on sent que le politique a été convié pour jouer de son image bonhommique, sans que le rôle n’ait une réelle importance. L’alcool comme fil conducteur qui offre toute une série de rebondissements comiques – dont certains fonctionnent mieux que d’autres – à un rythme soutenu, assez pour tenir les 1h19 facilement.
Il y a quelque chose de presque intemporel dans Super-bourrés. Ces paysages mangés par la chaleur offrant un aspect de western fait partie du charme du film. Les teintes chaudes sont rassurantes et l’utilisation du Scope est plutôt ingénieuse, intégrant les décors dans le récit. Bastien Milheau et sa décoratrice Clémence Petiniaud (qui a notamment travaillé sur Petit Paysan) insuffle une forme de fantastique lorsque les deux jeunes se retrouvent face à cette distillerie clandestine nichée au fond d’une cave où les vapeurs suent de tous les tuyaux. Si Pierre Gommé et Nina Poletto portent le tout de leur gouaille contaminatrice, iels sont accompagné·es de seconds couteaux tout aussi plaisants : Barbara Schulz ou encore Vincent Moscato, qui trouve peut-être là son rôle le plus drôle à ce jour.
C’est un premier essai réussi pour Bastien Milheau qui se replonge dans ses souvenirs d’enfance pour dépeindre un joli récit d’émancipation sur fond d’amitié, de transport de barils à dos d’âne et de château d’eau… enfin de vin. Finalement Super-Bourrés c’est comme une bonne eau de vie de prune, surprenant et vivifiant.
Super-Bourrés de Bastien Milheau. Avec Pierre Gommé, Nina Poletto, Vincent Moscato… 1h19
Sortie le 30 août 2023
Bonsoir j’ai été voir le film mais je ne me souvient plus de la musique de fin au niveau des remerciements pouvait vous m’aider à la retrouver pour l’écouter svp
Bonjour, il s’agit de la chanson Les murs de poussières de Francis Cabrel 🙂