S’il y a bien quelque chose d’inquiétant à notre époque, c’est la facilité avec laquelle une personne lambda peut être capable de développer une idée/thèse basée souvent sur très peu d’informations et données fiables pour en faire une vérité à laquelle il faudrait adhérer. Pour son septième film, la réalisatrice Jessica Hausner décide de s’attaquer au sujet des gourous et leur influence sur les jeunes avec un raffinement digne d’une bonne grosse bouillabaisse.
Miss Novak vient d’arriver dans un internat anglais à l’initiative des parents d’élèves afin d’y dispenser des cours d’Alimentation consciente. Une nouvelle pratique incitant à manger en pleine conscience, lentement et en méditant via des exercices de respiration avec pour but de limiter son alimentation et bannir la nourriture d’origine animale. Un petit groupe d’élèves qui souhaite élever leur conscience s’inscrivent à ce cours sans savoir l’impact et l’influence que va avoir Miss Novak sur leur existence.

Si le propos de base est intéressant à analyser à une époque où l’information et la désinformation sont accessibles facilement et dès l’adolescence, Jessica Hausner se prend les pieds dans le tapis à plusieurs reprises. Si l’interprétation du casting est impeccable (Mia Wasikowska en tête), elle est étouffée par une mise en scène tape à l’oeil. L’effet clinique – des comportements des personnages ou des lieux dans lesquels ils évoluent – n’est pas déplaisant et même plutôt bien exécuté, mais devient vite monotone et répétitif, nous donnant la désagréable sensation que la réalisatrice essaie de nous faire comprendre son idée au forceps. Les plans de caméra se suivent et se ressemblent, plus de surprise à mesure où le film avance – même si cette mise en scène ne déplairait pas à Ruben Ostlund tant les similitudes avec un The Square sont palpables -.
Si on fait abstraction de la mise en scène finalement peu inspirée, le vrai problème de ce film réside dans son récit. La satire proposée tente de mettre le doigt sur de véritables problèmes de société : l’endoctrinement des jeunes, l’influence néfaste d’un corps enseignant censé protéger ses élèves, les troubles du comportement alimentaire (TCA), mais le fait de manière très maladroite, jusqu’à créer des contresens. La mise en scène distante n’aide pas au récit puisqu’à aucun moment le/la spectateur·ice ne peut se sentir impliqué·e. Pire, cette distanciation provoque des rires face à des situations qui ne sont en aucun cas marrantes et relèvent de véritables problèmes psychologiques liés aux TCA. En voulant se moquer du système, Jessica Hausner se moque également de ses victimes. Faire rire la salle en traitant la professeure de boulimique ou en faisant vomir une jeune fille devant ses parents avant de manger son vomi sous couvert de dénoncer un système n’est pas efficace, c’est même dangereux.
Faussement esthétique et puant dans sa façon de disséquer et d’analyser, Club zero vaut bien son nom tant il n’y a rien à retenir de ce film qui veut se la jouer provoc (tiens ça nous rappelle Sans filtre ça…) pour cacher un vide intersidéral.
Club Zero, de Jessica Hausner. Écrit par Géraldine Bajard et Jessica Hausner. Avec Mia Wasikowska, Sidse Babett Knudsen, Elsa Zylberstein… 1h50