Le projet The Flash avait tout pour être mort et enterré : report de la date de sortie, reshoots, tête d’affiche accusée de violation de domicile et de détournement de mineure, la liste est longue. Pourtant, le DCEU a quand même maintenu la sortie du film censé sauver la franchise avant que James Gunn ne vienne faire le ménage. Autant le laisser se noyer, ce sera plus agréable pour tout le monde.
Bienvenue dans le multiverse (pour changer) ! Barry Allen découvre un nouveau pouvoir, celui de dépasser la vitesse du son, ce qui lui permet de retourner dans le passé. Sans hésiter, l’analyste scientifique retourne dans son enfance pour empêcher que sa mère ne se fasse tuer et que son père ne soit accusé du meurtre. Coincé dans une autre version du passé, il retrouve des simili-personnages, certains que nous connaissons, d’autres non, et s’embarquent dans des aventures aussi fades que Barry Allen lui-même.

Pas très vif Barry
Chez DC, la compétition pour voir en combien de temps le/la spectateur·ice soupire de désespoir est rude. Après un Black Adam un poil divertissant et parfois filmé de manière décente, Shazam 2 nous prouve que l’espoir est vain pour cette recette qui ne fonctionne toujours pas, accumulant des films de plus en plus moches et de moins en moins bien écrits. Après un traitement du personnage catastrophique, les scénaristes décident de doubler sa présence à l’écran, multipliant en conséquence la paresse d’écriture par deux. Blagues de cul pas drôles, épuisantes, allant jusqu’à faire référence – coïncidence malheureuse, sans doute – aux déboires actuels d’Ezra Miller, la gêne est présente. Que l’on se rassure, l’ami Flash a le temps d’aller sauver un hôpital pendant que son sandwich – sûrement à la saucisse – se prépare, et des bébés se retrouvent dans un micro-ondes. Un plaisir pour les fans de comic books, qui renouent avec ce personnage qu’ils aiment tant ? Nul doute qu’alors que tout ceci ne constitue que l’introduction, iels se sont déjà barré·es. Le désastre, lui, continue sa route.
Là où le nœud scénaristique pouvait contenir quelques promesses, le film ne sait jamais où aller. Il vient, pour jouer la nostalgie, retrouver Michael Keaton en costume de chauve-souris, lui qui a visiblement épuisé ses actions chez McDo et était en besoin de renflouement, acceptant un piétinement dans les règles. Supergirl, qui a pour seul défaut celui de ne pas être Superman, regarde sa propre inexistence à l’écran défiler devant ses yeux, et rejoint le groupe très prisé des personnages féminins faire-valoir. Une trame qui ne dépasse pas d’un millimètre, des personnages qu’on nous impose sans s’inquiéter d’un quelconque attachement de notre part, et une bonne grosse pancarte avec écrit : “EH, VOUS AVEZ VU NOS CAMÉOS, ILS SONT TROP COOL, NON ?”. ChatGPT n’aurait-il pas une quelconque implication dans le processus scénaristique, tant les dialogues bâclés sont un condensé de pseudo-répliques cultes balancées à intervalles réguliers ? Cette théorie se confirme d’ailleurs à l’écran.

“ChatGTP, réalise moi un film moche, merci.”
Si on pouvait soupirer dès les premières minutes, ce n’est rien face à la catastrophe visuelle qui nous attend. L’objectif de nous provoquer des cauchemars est parfaitement réussi. On se surprend à imaginer les étapes de validation de la production, pris·e en otage par un mélange entre une intelligence artificielle qui conçoit des fantasmes malformés et un je-m’en-foutisme notoire, impression confirmée par des scènes plus que honteuses, à l’image du climax indigeste, illisible et surtout irregardable. La photographie est, aux côtés de la dignité du DCEU, planquée derrière un fond vert, lui bien visible. Paradoxalement, on reconsidérerait presque l’introduction douteuse, et on se dit que les fans ont bien fait de se barrer.
Il est même assez inquiétant de voir qu’un studio avant tant de bouteille est incapable de nous proposer un film avec un minimum d’intentions. Comparaison triste quand la série du même nom était bien plus aboutie, visuellement, scénaristiquement. Trop en faire n’est clairement pas une idée fine, notamment quand on a déjà bouffé du multivers foireux et des caméos cache-misère à foison côté Marvel. Après avoir atteint le fond à de multiples reprises, le DCEU prouve que son budget passe dans la qualité des pelles qui lui permettent de creuser plus profond encore, par-delà des limites que l’on n’imaginait pas. C’est peut-être ça, “dépasser nos attentes”. The flash est plus qu’un aveu d’échec effroyable, et nous que l’adaptation des super-héros au cinéma reste apparemment compliquée, tant qu’on des ayant-droits cyniques les entrevoient comme la foire à Neuneu. Heureusement, quand on ne se retrouve pas face au parc d’attractions débilisant, il nous reste des Matt Reeves pour relever le niveau. En attendant, on observera avec un plaisir non dissimulé le DCEU couler à pic.
The Flash d’Andy Muschietti. Écrit par Christina Hodson, Jonathan Goldstein et John Francis Daley. Avec Ezra Miller, Sasha Calle, Michael Shannon… 2h24
Sortie le 14 juin 2023