On attendait avec une impatience non feinte le nouveau film de Sang-ho Yeon, le réalisateur du fantastique film Dernier train pour Busan. Innovant, malin et inattendu, il a fait l’effet d’une bombe lors de sa sortie et a rendu caduc les derniers longs-métrages traitant de zombies. Archaïque, idiot, et attendu, Peninsula fait l’effet d’un pétard mouillé. Considéré comme un film extension de l’univers proposé dans Seoul Station et Dernier train pour Busan, tout donnait envie: une Corée du Sud à l’abandon, des grands espaces où l’inventivité du réal peut s’épanouir à foison. Dernier train pour Busan était son huis-clos radical où chaque plan transpirait l’inventivité, l’idée de voir cette dernière à travers son exact opposé pouvait nous rendre curieux.
Après le visionnage de Peninsula, l’impression d’un rapt se fait grandissant. Mais où est passé Sang-ho Yeon ? A-t-il un frère jumeau qui l’aurait remplacé pour tout saccager ? La gravité des mots est justifiée tant la seule filiation possible entre les deux films est celui du zombie, tant la réalisation ou l’écriture semblent avoir disparues de ce long-métrage. C’est un reniement, un aveu d’échec. Jung-seok, un soldat ayant tout juste réussi à fuir la Corée du sud infestée, doit retourner sur place pour une mission à plusieurs millions de dollars. Il y découvre très vite de drôles de survivants. L’ouverture est une forte prise de parti du réalisateur, qui s’évertue à se distinguer de la première oeuvre. Dans ce bateau censé emmener les demandeurs d’asile à Hong-Kong, la panique se fait grandissante à l’idée de voir un simili Dernier train pour Busan sur voies maritimes. Simple introduction censée nous remettre dans le bain, la séquence nous pose face à l’éphémère, le caractère survivaliste des films de zombies, avant de nous lancer dans le bac à sable.

La subtilité de l’ouverture n’a d’égale que la pathétique mise en place de la ville coréenne abandonnée. Patchwork de stéréotypes propres au genre, entre la bande de soldats déchus sans morale qui s’amuse en envoyant les plus faibles lutter dans des arènes, et la famille recomposée débrouillarde qui survit avec facilité dans ce nouveau monde. À cet instant, et dans la manière de nous les introduire, la mise en scène et l’écriture de personnages font mouche : les jeunes filles gouailleuses survivantes montrées comme des héroïnes modernes aux tactiques originales pour éloigner ou affronter les zombies. On sourit, mais on déchante rapidement, tant les clichés prennent le pas, et qu’on se retrouve dans un simple récit de très gentils contre très méchants.
Une rédemption au rabais
La quête de la rédemption sous-tend Peninsula, celle de Jung-seok qui laisse sur le bas côté de la route une famille qui se trouve être celle qu’il va rencontrer quatre ans après lors de sa mission. Ce thème est une balle dans le pied pour le récit qui délivre à l’occasion un scénario prévisible et mal écrit – rappelant de mauvais épisodes de The Walking-Dead -. La rédemption existe dans une conclusion désastreuse qui joue sur des situations rocambolesques. C’est précisément à ce moment que l’on commence à se demander si Peninsula est un nanar. Le réalisateur peine à jouer avec le bac à sable qui lui est proposé, par un sens du montage totalement inexistant, ainsi que des courses poursuites et fusillades illisibles. Les effets numériques sont également datés, avec des airs de jeux PS2 nous rappelant la catastrophe qu’a été Cats.
Le réalisateur est totalement dépassé par l’attente engendrée par Dernier train pour Busan. Cette attention particulière de la part du public a donné une envie de démesure très vite limitée par ses moyens et par une écriture digne d’un Soap Opera.
Les mots de Thierry : À vouloir se la jouer 28 Jours Plus Tard, décrire un monde qui n’a plus la surprise de l’arrivée de l’épidémie – idée brillante du film -, Peninsula se retrouve dépassé par ses ambitions et contraint à mimer un épisode de Resident Evil où tout s’accorde pour maintenir la médiocrité. Après ces cinématiques ridicules où l’on tente de vain d’attraper sa manette pour sauver ces pauvres protagonistes qui peinent à avancer – et ont le cul bordé de nouilles vu comment ils se sortent de toute situation -, on s’égare à fantasmer une Milla Jovovich qui, à défaut d’avoir été charcuté par un monteur épileptique sept épisodes durant, a un minimum de charisme.
Les mots de Margaux : S’il y a bien une grosse déception en cette fin d’année c’est bien Peninsula. Quel fossé comparé à Dernier train pour Busan. Le problème ne réside pas dans la qualité moindre de cet énième film de zombie mais de savoir que cela vient d’un réalisateur qui avait déjà fait ses preuves, quelle déchéance. Visuellement atroce, un scénario qui tient sur un post-it avec un plot twist digne des meilleures telenovelas, Peninsula n’a d’intérêt que les rires qu’il nous provoque (et encore).
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