Le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, c’est trois siècles d’histoire et une région qui a connu d’énormes bouleversements sociologiques, historiques et économiques. Désormais inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, ce lieu est emprunt d’une force de caractère indéniable qui sent bon le dur labeur et le travail manuel. C’est à cette région que Mathias Mlekuz a voulu rendre hommage dans Mine de rien.
Alors que leur mine a fermé et risque la démolition, Arnault et Di Lello décident sur un coup de tête de transformer le lieu en parc d’attraction artisanal. Armé de peu de moyens mais de beaucoup d’envie et d’amour pour ce lieu, ils vont mettre en chantier un projet qui leur permettra à tous de retrouver autant le sourire que la dignité.
Intemporel – même si le film s’inspire clairement des années 80 -, Mine de rien s’inscrit très rapidement dans un contexte économique très actuel, une crise économique qui oblige certains corps de métier à mettre la clé sous la porte, l’industrialisation qui prend le pas pour tout raser et s’implanter au détriment d’employés qui se retrouvent dans des stages de formations pour des métiers qui ne sont pas le leur. C’est dans ce contexte tendu qu’Arnault et Di Lello se lancent dans ce projet fou. Un projet qui résonne d’autant plus en eux que leur vie personnelle est aussi catastrophique que leur situation professionnelle. Arnault est divorcé, son père minier décédé, les relations avec ses enfants tendues et pour couronner le tout il est obligé de retourner vivre avec sa mère pour l’aider alors qu’elle ne se console pas de la mort de son mari – traînant toujours avec elle une boîte de poudre au cacao dans lequel gisent les cendres de ce dernier -. Di Lello de son côté est volatile, il aime les femmes et en profite sauf qu’il est marié, a un enfant et utilise Arnault comme alibi. En plus de ce projet auquel peu de monde croit, ils vont devoir se battre contre une maire prête à tout pour démolir ce lieu.

Comédie sociale en bonne et due forme, le film s’étend plus généralement à ces gens qui se retrouvent sans emploi du jour au lendemain alors que leur lieu de travail leur était cher. D’autant plus dans les mines où le métier se transmet généralement de père en fils. Un héritage conséquent, où les acteurs de ces siècles de dur labeur ne peuvent voir une destruction ou une industrialisation que comme une honte. On s’attache rapidement à tous ces personnages, ces différentes générations réunies autour d’une idée et d’une chose qui est finalement le cœur de leur vie. On va suivre les obstacles qui se mettent sur leur chemin avec en parallèle leurs vies respectives et comment ils vont devoir apprendre à se reconstruire : pardonner, grandir, avancer… Comme à son habitude, Philippe Rebbot est absolument formidable et donne une dimension aussi comique que dramatique à ce coureur de jupons. Mais la plus grosse surprise c’est bien Arnaud Ducret. Celui qu’on a l’habitude de voir faire le pitre endosse un rôle beaucoup plus grave et sérieux. Accablé de partout et sans perspective d’avenir, ce parc d’attraction sera son salut autant envers ses collègues qu’envers sa famille. Il offre une prestation tout en gravité mais qui arrive à être solaire par moments sans jamais en faire trop.
D’ailleurs le film trouve son équilibre pour ne pas tomber dans le misérabilisme que peut parfois donner la comédie sociale. Le film aime ses personnages de manière très simple pour rendre un très bel hommage aux miniers de cette époque mais peut-être surtout à tous ces travailleurs qui se saignent pendant des années, ces gens qui – victimes de l’industrialisation – perdent leur travail du jour au lendemain et toutes celles et ceux qui se battent au quotidien pour vivre.
Avec beaucoup de pudeur, de classe mais sans jamais oublier l’humour, Mathias Mlekuz dépeint une réalité sociale et économique qu’on ne peut décemment pas oublier. Un hommage à un patrimoine de notre pays et à ces oubliés de la société.
Mine de rien de Mathias Mlekuz. Avec Arnaud Ducret, Philippe Rebbot, Mélanie Bernier… 1h25
Sortie en VOD le 15 avril