Après dix ans d’absence, l’acteur et réalisateur Nadir Ben Yadir revient avec un nouveau film : Animals. Ce dernier relate un drame qui a bouleversé le pays et que le réalisateur a voulu mettre en image pour éveiller les consciences, quitte à pousser les curseurs de ce qu’on peut montrer au cinéma à sa limite. Rencontre avec un réalisateur engagé.
En 2012, le meurtre d’Ihsane Jarfi à l’âge de 32 ans est le premier à être qualifié d’homophobe en Belgique. Qu’est-ce qui vous a poussé à prendre ce fait divers pour en faire un film ? Comment avez-vous convaincu des producteur·ices de financer un tel projet à la violence très frontale (on y voit une partie des sévices infligés à Brahim, (ndlr : nom déguisé d’Ihsane dans la diégèse du film) ?
C’est devenu une évidence le jour où j’ai suivi le procès. J’ai vu, en tout cas dans les yeux des assassins, qu’il n’y avait aucun remords. Je me suis dit qu’il fallait absolument faire un film. Mais entre l’envie de faire un film et le moment où on se dit « On va y aller », il y a plusieurs mois qui passent. Puis quand tu te rends compte de ce qu’ils lui ont fait subir et qu’il n’y a absolument aucun remords, là, tu dis : « OK, c’est ce que va raconter le film, finalement ». Au delà de la fin d’Ihsane, c’est la naissance des monstres. Je pense sincèrement que ce film n’aurait jamais pu voir le jour en France, je parle en termes de production. On quand même essayé de chercher des coproducteurs. On a une coproductrice française qui a investi, etc, mais si on avait fait le chemin des télévisions, tout ça, je pense que ça aurait été impossible de financer le film. Je pense que c’est beaucoup plus simple en Belgique de faire des choses. Cependant ça a été aussi compliqué en Belgique. Heureusement, ce n’était pas mon premier film, mais ça a été compliqué de le mettre en place. C’est à dire que les partenaires du film sont les partenaires qui étaient là dès le départ et qui ont cru au film. C’est soit on adhère, soit on n’adhère pas au projet.
Hassan, le père d’Ihsane a été consulté sur le projet, un projet qui doit être d’autant plus compliqué à aborder lorsqu’il s’agit du meurtre de son propre enfant. De quelle manière lui avez-vous présenté le sujet ?
J’ai eu la chance qu’il avait vu mes premiers films et qu’il aimait déjà mes travaux précédents. Je sais qu’Ihsane aussi avait vu mon premier film et l’avait aimé. Il m’a dit : « T’es comme le grand frère d’Ihsane, donc fais le ». Hassan n’a pas voulu voir le film, mais on a la chance qu’il soit un vrai cinéphile avant d’être juste une personne impactée par ce drame. Donc, il connaît la liberté du cinéma. Il était au courant de tout évidemment. D’ailleurs, même le poème dans la première partie que le papa lit à Ihsane, c’est un poème que le papa a écrit pour le film. Donc oui, il était impliqué, mais évidemment, on peut comprendre qu’il ne veuille pas voir le film. On a tourné à Liège, à côté de chez eux, dans les rues même où ça s’est passé. C’était un truc assez particulier.
Quand vous parlez du public ciblé, le film est quand même interdit aux moins de 16 ans. Est-ce que vous n’avez pas peur que cela réduise son impact ?
Oui, mais je sais qu’un film, ça existe après la salle de cinéma et qu’à un moment donné, les gens qui veulent le voir le verront. En Belgique il est déconseillé aux moins de 18 ans. Il n’y a plus d’interdiction, c’est à dire qu’il y a une espèce d’hypocrisie dans le système. On vous interdit d’aller voir un film au cinéma, mais par contre, on ne va pas vous l’interdire à la télévision. On ne va pas vous l’interdire sur Internet, mais par contre, dans la salle de cinéma, on va vous l’interdire. Donc il y a un truc où la société a évolué, mais à un moment donné, il y a des gens qui n’ont pas évolué. Je ne dis pas qu’il faut ouvrir le cinéma à tout le monde. Je pense qu’il faut repenser les outils. Je pense qu’il faut repenser les choses. Il y a des scolaires qui viennent voir le film en Belgique. On a des débats avec des écoles. Et les jeunes, ils sont évidemment choqués par le film mais pas par rapport à la violence. Plein de jeunes disent « La violence, on la voit sur Internet », etc. Ce qui les choque, c’est que ça soit une histoire vraie et qu’ils voient ça dans une salle de cinéma alors qu’ils ont l’impression que c’est un film qu’ils auraient pu voir sur Internet, sur YouTube, de par la manière de filmer avec des téléphones. Donc il y a quelque chose d’intéressant dans le débat. On va même créer un dossier pédagogique avec des psychologues. Donc il y a un truc où on est deux pays voisins, mais ça ne se passe pas de la même manière.
Pour la reconstitution, vous avez eu accès à des documents particuliers ou vous vous êtes seulement basé sur le procès ?
Le procès et des photos sur l’état du corps. C’est très précis. Là, on va parler de mots et de photos, mais c’est très précis dans la manière dont on filmait, c’est à dire le procédé des GSM, etc. Mais il y a des choses qu’on ne pouvait pas filmer et des choses que je n’arrivais pas à filmer parce que c’était horrible. On est très, très loin de la réalité, de la violence qu’a pu subir Ihsane. Il faut savoir que la seconde partie, on a l’impression que ça dure une demi heure, mais ça dure à peine dix minutes. Dix minutes, au cinéma, c’est très, très long, mais ce qu’il a subi, ce sont en réalité six heures de sévices.

Votre film se compose de trois parties assez distinctes. La première nous plonge dans la famille d’Ihsane lors de l’anniversaire de sa mère et elle est majoritairement composée de plans séquences. Comment vous avez travaillé cet aspect là ?
On a beaucoup travaillé, c’était vraiment des longs plans séquences. On a répété avec toute l’équipe technique en permanence, avec les figurants même. On a vraiment l’idée qu’on soit avec le personnage de Brahim, qu’on soit en permanence avec lui. C’est quelqu’un qui n’arrête pas de bouger parce qu’il “n’a pas sa place dans cette maison”. Il essaye d’être parmi eux mais il attend quelqu’un. L’idée, c’était vraiment d’essayer de créer ce plan étouffant parce qu’il est entouré et que lui n’arrête pas de bouger. On était dans une vraie radicalité, il y a la scène du coffre (dans la seconde partie ndlr.) qui est hyper longue et on a essayé d’être le plus radical et sans concession dans le découpage. C’est super intéressant parce que quand vous voyez le premier plan séquence du film, c’est un plan qui dure six ou sept minutes, mais c’est quand même cinq, six séquences. Et si je ne l’avais pas fait en plan séquence, j’aurais dû faire une quarantaine de plans. Donc le procédé du plan séquence est un concept hyper intéressant parce qu’en fait, vous englobez tout et vous obligez toute l’équipe technique et toute l’équipe artistique d’être dans la même mélodie et dans le même rythme. Et c’est ça qui fait qu’à un moment donné, il y a quelque chose qui se crée.
Je trouve d’ailleurs quelque chose de très beau dans cette première partie, c’est qu’on ressent forcément la détresse de Brahim et le fait qu’il n’est pas à sa place. Et en même temps, vous arrivez à donner une vie, un visage à ce jeune homme qu‘on a connu qu’à travers les médias et à travers ce drame.
C’est vrai. Ça, c’était vraiment hyper intéressant, le côté même un peu mystérieux, mais solaire. Et puis, ce qui est aussi intéressant, c’est qu’on voit quand même que dans la famille, il y a de l’amour pour le fils. Et ça, c’était quelque chose de primordial à montrer. Ils sont un peu coincés de par le côté culturel, la religion, mais il reste quand même de l’amour. Quand Brahim n’a pas sa place dans cette maison, c’est Ihsane qui n’a pas sa place dans la société.
Pour la deuxième partie, pourquoi avoir choisi de filmer à travers les téléphones des agresseurs et comment s’est organisée toute cette partie de tournage ?
On s’est posé la question, évidemment, de la représentation de la violence qui a transcendé toute la fabrication du film, de l’idée de base jusqu’à la sortie mais aussi pendant le montage. On s’est tous mis d’accord sur le fait qu’il fallait justement que ce film ait un impact et qu’il fallait, je pense, montrer la violence de cette manière. Moi, je n’aurais pas pu faire le film différemment. Je pense que le procédé des GSM, le côté un peu réaliste, le côté hyper violent, fait que c’était un truc à côté duquel on ne pouvait pas passer. Suggérer la violence, je pense que ça aurait été impossible pour moi de le faire, parce que c’est un film sur la société actuelle. C’est la société qui est violente. Mon film n’est que le miroir de la société. Il sert un peu à bousculer les consciences et je pense que c’est la seule manière. L’impact de l’image est plus fort pour moi que l’impact des mots. Je pense que le cinéma sert à ça aussi. Vous pouvez tomber sur une personne qui n’a jamais lu de livres, mais vous tomberez jamais sur une personne qui n’a jamais vu de film. Ce n’est pas possible. Ça n’existe pas. Et donc pour moi, le cinéma sert à ça. Le GSM aussi est une arme. Quand ils se filment, ils veulent être les plus beaux, les plus belles, les plus forts, les plus virils, etc. Le GSM augmente la violence. On va être le plus fort, le plus viril, le plus dingue. Et ça, c’était hyper intéressant. Tout a été filmé avec des téléphones, tous un peu différents. On travaillait en amont la mise en scène avec le cascadeur, avec le régleur de chorégraphie qui avait entraîné les comédiens à donner et à recevoir des coups. Et après, c’est les comédiens qui filment eux-mêmes avec le téléphone et ils ont eu une espèce de carte blanche pour faire ce qu’ils voulaient : tourner en vertical, horizontal, se filmer eux. Donc ça part vraiment sur des bases d’improvisations, de dialogues, nourris de violences, de coups. Quand vous donnez la liberté à quelqu’un de pouvoir filmer ce qu’il veut, il va aussi se filmer lui-même. Et après, vous avez cinq caméras, vous devez choisir la matière et voir si tout passe. Donc c’était un procédé assez intéressant que ce soit pendant le tournage ou pendant le montage.
C’est d’autant plus intéressant car on met en quelque sorte le spectateur aussi à la place de la personne qui tient le téléphone et qui filme ces horreurs.
Oui, on est une espèce de voyeur témoin, c’est-à-dire qu’on n’a pas spécialement envie de voir. En fait, c’est ça aussi la violence. C’est au-delà des coups, c’est le côté brutal et le côté réaliste, c’est ça qui fait qu’à un moment donné, ça en devient un peu dérangeant. Sauf que là, ça se passe dans un écran de cinéma, donc vous pouvez pas arrêter le film. Tandis que quand vous êtes sur votre téléphone, ce genre de vidéo on les regarde pas en famille, on les regarde seuls donc il y a un côté intime. C’est comme si les gens savaient que vous regardiez cette violence et que vous ne voulez pas cautionner, sauf que vous êtes bloqués. Les gens me disent que la première partie est très cinématographique, la troisième également, mais la deuxième est très réaliste. Moi, je pense que c’est la deuxième partie qui est très cinématographique. C’est le cinéma 2.0 d’aujourd’hui. C’est tout le monde qui fait ses propres films, tout le monde qui se met en scène. Et je pense que c’est un cinéma qui est là, qui est dans les réseaux, qui est dans les plateformes comme YouTube, etc. C’est des gens qui se mettent en scène. Pour moi, c’est ça la violence.
Comment avez-vous travaillé avec tous les acteurs pour les scènes de cette deuxième partie ? Parce que j’imagine que c’était la première fois qu’ils tournaient quelque chose d’aussi intense.
Bien sûr. Oui. Après, il faut vraiment se mettre dans le contexte d’un plateau de cinéma. C’est 2m30 de tournage et une demi-heure de sneakers, de bounty, de thé et de café. Ça reste très intense, mais c’est entrecoupé de pauses et de discussions, etc. Donc oui, c’était un peu dur, mais c’est surtout le fait de voir le film qui est dur aussi pour les comédiens qui n’avaient jamais joué dans un film. Ce qui est intéressant, c’est que ceux qui jouent les assassins sont des gens qui n’avaient jamais joué. Maintenant, ils sont des acteurs, mais ils sont à l’opposé des personnages.
Justement comme vous le disiez, les quatre agresseurs sont des non-professionnels. Comment les avez-vous trouvés ?
On a fait un casting un peu sauvage qui a pris du temps. J’avais casté déjà des gens, même des comédiens pour jouer un peu les personnages des assassins, mais ça ne marchait pas du tout parce qu’il y avait une intonation théâtre, des gens qui avaient trop de codes. À vouloir être beau, à vouloir ne pas bégayer, à vouloir avoir un vrai ton et dans ce film là, ça ne marchait pas. Donc, on a pas pris des gens qui n’ont jamais joué. Mieux encore, on a pris des gens qui n’avaient pas spécialement envie de jouer.

Le parti pris du troisième segment est surprenant. Pourquoi avoir choisi de se concentrer sur l’après, mais via un des agresseurs ?
D’où la radicalité du propos. C’est-à-dire que pour moi, il y a un lien entre la première et la troisième partie. On a deux personnes qui ont un secret dans une fête et on les lie. Ce qui m’intéressait, c’était le plus jeune, c’est-à-dire le plus fragile. C’est quoi un lendemain d’assassinat ? Qu’est ce que ça raconte ? Pour moi, c’était hyper intéressant. On a beau dire qu’on suit un des assassins, le plus jeune, celui dont personne n’imaginait qu’il allait devenir ainsi. Mais en le voyant, on ne peut pas oublier Ihsane et le personnage de Brahim, parce qu’ils sont en permanence là. Il est en permanence marqué dans la peau de ce personnage. Je pense que c’est ce qui est hyper violent pour plein de gens, d’abandonner la victime et d’avancer avec son assassin. Si j’avais fait un film un peu plus classique, je serais revenu chez les parents dans le drame, etc., mais ce n’est pas ce que je voulais. Ce que je voulais, c’est un film sur la société d’aujourd’hui, maintenant. Et c’est finalement un film sur la naissance des monstres.
Vous n’aviez pas peur qu’on puisse se dire qu’avec cette troisième partie, on cherche peut être des excuses ou en tout cas des circonstances atténuantes à cet agresseur ? Parce qu’on voit très bien qu’il retourne dans sa famille, on voit très bien que même sa famille à lui est très dysfonctionnelle, qu’il y a de la violence.
Non, il n’y a aucune raison ou aucune excuse. Si toutes les personnes qui avaient une famille dysfonctionnelle pouvaient assassiner des gens, on serait encore très peu de personnes vivantes. Mais c’est les gens qui ont un problème avec ça. Ce qui m’intéresse, c’est de filmer un monstre qui a un visage d’ange. Ce ne sont pas des gens de deux mètres avec un regard effrayant et des dents pourries. Ça peut être la personne hyper serviable qui, à un moment donné, bascule. Il n’y a aucune excuse et aucune raison de faire ce qu’il a fait. C’est la réalité. Il n’y a aucune raison de l’excuser ou de le pardonner. Pour moi, c’était une manière de filmer et de continuer à vivre avec Brahim et de filmer ce jeune homme lambda. Personne ne comprenait pourquoi il avait fait ça. Les autres sont irrécupérables. Ce qui m’intéresse, c’est comment tu bascules ? Comment, pour exister dans un groupe, tu dois devenir le groupe ? Jusqu’où on peut aller pour exister ? Et la seule manière pour moi d’exister, et ça parle de cette société, dans un groupe, c’est d’être, c’est de rentrer dans la masse, c’est de ne plus avoir de personnalité, c’est de suivre.
D’ailleurs, c’est ce qu’on ressent aussi dans toute la scène où ils sont dans la voiture et où on sent très bien qu’on a un leader et certains ne sont pas forcément d’accord avec ce qui est en train de se passer et pourtant, ils suivent le mouvement.
Exactement, ils suivent le mouvement. C’est jusqu’où tu vas aller pour essayer de ressembler, pour essayer d’exister dans une société, dans un groupe, dans une famille. Jusqu’où tu veux aller pour t’intégrer dans un groupe ? Il y a des gens qui vont aller au delà de leurs principes, prendre de la drogue ou aller au-delà de leur éducation. Il y en a d’autres qui vont essayer de prouver qu’ils sont comme les autres, de prouver qu’ils sont même encore plus forts, jusqu’à un drame. En fin de compte, c’est quelqu’un qui s’intègre dans un groupe, finalement, en désintégrant quelqu’un.
On a parfois ce débat sur la violence gratuite qu’on peut voir dans les films. Ici, la violence, c’est le cœur même du film et elle est nécessaire au récit. Et pourtant, paradoxalement, on se refuserait presque à regarder. Est ce qu’il faut qu’on passe par là pour essayer d’évoluer et de faire de la prévention ?
C’est très simple. C’est que je pense qu’une image dit plus qu’un mot. Quand vous voyez des articles qui sont sortis sur la mort d’Ihsane, le procès ou des détails de son assassinat, c’est juste quelques mots. Moi je voulais rentrer dans la précision. À un moment donné, soit vous écrivez quelques mots, soit vous en faites un film d’une heure et demie. Moi, j’ai fait un film sur la violence, sur la société dans laquelle on vit, sur la création des monstres. Et je ne peux pas faire un film sur la société d’aujourd’hui sans parler de la violence, parce qu’elle est omniprésente, elle est là en permanence. Et donc je ne pouvais pas faire ce film en suggérant ce que je disais et c’est ce que disait le papa d’Ihsane. Ils n’ont pas suggéré les coups. La mort d’Ihsane n’est pas suggérée. Ils l’ont laissé pour mort. Ils auraient pu le sauver. Et donc pour moi, c’était impossible de faire le film autrement. Je pense sincèrement qu’on aurait pu tourner ce film différemment, de manière suggérée. C’est la force du cinéma. Tout est possible, mais moi, je n’aurais pas pu le faire que comme ça. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on se parle maintenant.
Animals réalisé par Nabil Ben Yadir. Écrit par Nabil Ben Yadir et Antoine Cuypers. Avec Soufiane Chilah, Gianni Guettaf, Vincent Overath… 1h32
Sortie le 15 février 2023
Merci à Mensch Agency.
[…] L’INTERVIEW de Nabil Ben Yadir par MARGAUX SUR « On se fait un ciné » […]
[…] de nouveau d’un fait divers pour son dernier long-métrage. Nous avons également eu l’occasion d’échanger avec lui quant à la réalisation de ce film. Le meurtre d’Ihsane Jarfi a secoué la Belgique en 2012 […]
[…] L’interview du réalisateur par Margaux : https://onsefaituncine.wpcomstaging.com/2023/02/15/nabil-ben-yadir-mon-film-nest-que-le-miroir-de-la-societe/?fra… […]