Au cours de ces dernières années, le cinéma a mis en lumière un monde agricole dans un état critique que ce soit à travers Petit Paysan ou Au nom de la terre. Durant ses années de recherches pour préparer son film, le monde agricole s’est glissé doucement comme une évidence. Et c’est sur fond de misère agricole que se déroule le premier long-métrage de Jessica Palud, Revenir.
C’est sous une chaleur écrasante que Thomas revient dans sa famille après douze années loin d’ici à vivre au Canada. Pendant ces années, la ferme a dépéri, sa mère est tombée malade, son frère s’est suicidé, son père lui adresse à peine la parole et il rencontre enfin son neveu. C’est dans cette famille brisée que tous ces êtres vont tenter de se reconstruire, et que Thomas va réapprendre à apprivoiser ces gens qu’il ne connait peut-être plus.
Revenir est un film où toute la colère est renfermée. Tous les membres de cette famille souffrent en silence de la perte d’un être cher mais également de la situation sociale dans laquelle ils vivent. En filmant ces personnages au plus près, sans fioritures, ce sont des âmes épuisées par la vie qui transparaissent à l’écran. Celle d’un frère qui semble avoir tout perdu, une mère désormais veuve, un enfant sans repère, un père qui cache un lourd secret pour s’en sortir financièrement. Aucun mot ne passe, simplement des gestes : parfois violents, primaires, bestiaux… Sous une lumière chaude et écrasante, les paysages participent à la beauté de ce film entre grandes plaines où respire la liberté et routes montagneuses signes d’une vie loin d’être sans embûches. Une tranche de vie capturée sur le vif où entrent en collision difficultés sociales et drame familial dans lequel les personnages sont les seuls à pouvoir trouver le moyen de s’en sortir.
Pour porter ce film, deux noms de choix dans le paysage français actuel : Niels Schneider et Adèle Exarchopoulos. Deux acteurs qui se sont souvent illustrés dans des partitions profondes et complexes et qui s’illustrent de nouveau à merveille dans des rôles qui demandent quelque chose qui passe par le regard et les gestes avant les mots. À contrario d’un Sybil où Adèle Exarchopoulos exprimait ses émotions sans aucune retenue, on la découvre ici avec énormément de pudeur. D’ailleurs les deux acteurs se livrent sans fard en se faisant filmer au plus près, quitte à voir tous leurs défauts, comme des êtres que la vie a déjà pas mal bousculé dans ce film. Une mention à celui qui complète le trio en la personne du jeune Roman Coustère Hachez, désarmant de douceur et de spontanéité.
Drame familial sur fond de difficultés sociales, Revenir est un premier film intimiste qui filme avec justesse ce qu’il faut, où il faut pour offrir une chronique de vie aussi douce qu’elle est poignante.
Revenir de Jessica Palud. Avec Adèle Exarchopoulos, Niels Schneider, Roman Coustère Hachez… 1h17
Sortie le 29 février