The Jane Doe Identity

[CRITIQUE] The Jane Doe Identity : terreur cadavérique

Le temps de l’automne venu, Halloween et ses angoisses refont surface. Un cru 2020 qui risque fort de voir déferler une meute d’ados relookés d’un masque chirurgical au lieu de jouer les panneaux publicitaires pour costumes de la foire-fouille. Pour s’y préparer mentalement, contrer le froid et la grisaille ne serait-t-il pas judicieux de se couvrir de son plus beau plaid jusqu’au cou pour grelotter de frissons ? Ça tombe bien, The Jane Doe Identity est là pour vous. Alors éteignez les lumières, veillez à ce qu’il n’y ait plus aucun bruit et préparez vous à vivre un cauchemar.

The Jane Doe Identity ou The Autopsy of Jane Doe dans sa version originale et dont le titre semble un peu plus cohérent au vu du métrage, est le deuxième film du norvégien André Ovredal. Découvert en 2010 par les amateurs du genre horrifique avec Troll Hunter, found footage mariant épouvante et fantastique pour marcher sur les plates-bandes d’un Cloverfield. C’est donc sept ans plus tard, qu’il vient déposer le cadavre d’une jeune femme sur la table d’autopsie de deux médecins légistes qui ne s’attendent pas à vivre la pire soirée de leur vie.

Autopsie qui tourne au vinaigre

C’est avec un postulat simple et un synopsis qui tiendrait sur une seule face de post-it que The Jane Doe Identity démarre. Le spectateur a à peine le temps de constater une scène de massacre et la dépouille récupérée d’un corps immaculé, qu’il est accroché aux côtés de Tommy Tilden et son fils Austin. Unité de temps et de lieu, coincé entre quatre murs d’une morgue locale de petite ville paumée des States. Dehors la tempête qui fait rage. Aucune raison de sortir, mais tout intérêt à connaitre l’identité de cette Jane Doe (femme inconnue) et les circonstances de sa mort.

La forme de huis clos apporte toute la matière essentielle à The Jane Doe Identity. André Ovredal utilise au mieux son maigre budget alloué pour maximiser l’angoisse. Si les personnages ne jouissent pas d’une immense épaisseur et d’un geste fulgurant d’écriture, ils sont suffisamment bien interprétés (Emile Hirsh et Brian Cox) pour susciter une préoccupation de leur sort. Collé à leur basque, on subit et découvre en même temps qu’eux les situations et les péripéties. Là où récemment The Vigil, premier film de Keith Thomas s’attache à la religion juive et utilise le corps d’un défunt comme prétexte à de l’horreur existentielle, The Jane Doe Identity utilise le corps comme outil et moteur de l’horreur. Tout passe par ce cadavre qui est la peur, la mort dans laquelle les deux médecins légistes y plongent directement leurs mains et leurs outils.

The Jane Doe Identity
© Wild Bunch Distribution

Par un éclairage de néons de cabinet médical, la chair parait si blanche et l’effroi se fait ressentir devant l’apparence d’une beauté pure qui ne respire plus. Des organes triturés, la peau déroulée, les mutilations pointent le bout de leur nez et un cours de faculté de médecine n’a jamais été aussi bien pensé. Un peu digne d’une partie de Docteur Maboul, chaque geste, chaque touché d’une partie du cadavre de Jane Doe paraît douloureux et l’impression qu’une sonnerie d’alerte est prête à retentir. Au fur et à mesure de découvertes sorties des entrailles, Tilden père et fils se transforment en enquêteurs. Et par la même occasion le spectateur en professeur Layton. Ce qui semblait au départ une simple routine devient un casse-tête foisonnant de bien des mystères.

The Jane Doe Identity
© Wild Bunch Distribution

Jouons un air venu des ténèbres

Peu à peu le thriller passablement écœurant finit par virer de bord. Comme un bon vieux chirurgien venu pimenter une fête étudiante avec son scalpel et son hachoir de BDSM, l’ambiance peut changer à tout instant. Avec un bruit de portes qui grincent et la lumière qui éclate, la tension intense devient un pur objet ténébreux qui fait mal. Certes la subtilité disparaît pour laisser place aux codes traditionnels de l’horreur, et les raccourcis sont empruntés pour dessiner une logique à l’histoire, mais le savoir-faire d’André Ovredal est suffisamment bien utilisé pour distiller des shoots de frissons qui font bondir du canapé.

Dans cet endroit friable aux allures de dernier purgatoire, c’est l’intime qui prédomine pour un père et son fils qui ne doivent plus se cacher. Fini le silence, la vérité doit éclater et les non-dits qui ont parcouru leur relation doivent être posés au grand jour. Afin d’expier tous les pêchés et libérer son esprit de la culpabilité, pour transporter son âme au paradis et laisser son corps aux griffes du chaos. Un comble pour un médecin légiste, se faire piéger par le propre exercice de sa fonction. Habitué à côtoyer et vivre avec la mort au quotidien, il finira par être confronter à sa fureur.

Véritable autopsie à corps ouvert, The Jane Doe Identity impressionne par la maîtrise de son sujet, et l’originalité de sa forme. Le gore devient terrifiant, la tranquillité devient angoissante. Un petit film bien tendu qu’on n’attendait pas forcément et qui continue de se démarquer d’une bouillabaisse horrifique habituelle. L’occasion de le ressortir du tiroir, ou de le découvrir pour les aficionados de sensations fortes et de nuits épouvantées.

The Jane Doe Identity, de André Ovredal. Avec Brian Cox, Emile Hirsh, Olwen Kelly… 1h27.
Sortie le 31 mai 2017.

2 Commantaire
  • 27/10/2020 at 16:25

    […] dit forcément fête pour enfants. Alors que les adultes vont s’amuser devant Conjuring et The Jane Doe Identity, les plus jeunes peuvent se délecter des Chair de Poule et compagnie. À cette occasion, 100% Loup […]

  • […] thriller implacable dans son efficacité (Phone Game), l’épouvante sur une table d’autopsie (The Jane Doe Identity), la cohabitation dans un supermarché avec des fanatiques religieux (The Mist) et le […]

Laisser un commentaire

En savoir plus sur On se fait un ciné

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading