[CRITIQUE] ADN : Ceci n’est pas une pub pour MyHeritage

Il est terrible de découvrir à la veille de la sortie d’ADN, des propos provocateurs et irrespectueux de la réalisatrice sur le féminisme. Le long-métrage ne mérite pas une telle promotion tant il arrive à être juste et à saisir et une vérité folle en ce qui concerne la question du deuil et ce qui s’ensuit. ADN nous parle d’un patriarche, d’un grand père, qui réunit une famille fragmentée. Atteint d’Alzheimer, il réussit avec l’aide d’une biographe à laisser une trace de sa vie dans un livre. L’œuvre de Maïwenn prend le point de départ et axe son film sur ce grand-père qui cristallise une partie de notre identité. Celle d’une personne qui prend conscience de faire partie d’un tout, par ses origines, sa famille, son lieu de vie et ses actions.


ADN se joue faussement sur le principe du film choral, en nous présentant une galerie de personnages tous plus différents les uns des autres. Appréciable dans sa façon de les traiter, ces personnages vivent particulièrement dans les yeux des spectateurs qui ici plus que jamais s’identifient à ces tantes, oncles, pères et frères. Maïwenn et Mathieu Demy apportent au scénario un soupçon de vérité qui infuse tout le long du récit. Il s’agit de scénettes qui vont donner à ces personnages le temps d’exister dans des moments précis et puissants. Que ce soit le choix du cercueil, l’enterrement, ces épisodes donnent aux spectateurs un certain rapport cathartique. C’est ce qui fait une des forces du film.


Le film se découpe assez facilement en trois parties, la première étant le moment qui précède le deuil, où on retrouve l’incandescent Dylan Robert qui joue le petit fils du grand père malade en Ehpad. L’apprenti rappeur partage avec innocence des moments beaux et intimes qui seront les derniers du vieil homme. La deuxième partie continue dans cette lancée pour nous introduire des acteurs hors-normes. On retrouve Fanny Ardent, Marine Vacht, Louis Garrel… Il va sans dire qu’il y a un génie dans l’installation de ce deuxième acte. L’ambiance austère et triste du décès d’un proche est un exercice d’équilibriste, où le moindre mouvement brusque amène la chute. Ici, l’écriture des personnages et tout particulièrement des dialogues donne une douceur à la gravité de la situation. Comme dans toutes les réunions de famille, les conflits multiples se confirment dans les étapes qui suivent le décès. La gravité des échanges entre les personnages, est souvent équilibrée par le détachement et la légèreté de François joué par Louis Garrel. Il arrive à tous les coups à désamorcer des moments difficiles, de gêne.

Malheureusement le film n’est pas exempt de défauts. Le sujet principal, la quête d’identité de Neige jouée par Maïwenn, qui dans un déclic va décider de se renseigner sur ses origines. Le film tourne très vite autour de son personnage qui souhaite renouer un contact avec l’Algérie, terre de son grand-père. On a vite l’impression dans de nombreuses scènes, que la fabrication du film en lui-même est la quête d’identité de Maïwenn. On y ressent très souvent un besoin égotique de la part de la réalisatrice de se filmer, de se montrer sans recul, et de manière maladroite dans une quête d’identité qui se mêle assez mal avec la question du deuil. Évidemment, cette quête est possible lorsqu’on perd un proche qui représente indéniablement une partie de nous-mêmes. Mais ici, on perd la justesse qu’on pouvait souligner précédemment.


ADN est un film puissant, fort dans son propos et dans son exécution. C’est un plaisir non dissimulé de voir cette famille aussi soudée, que blessée par elle-même évoluer à travers les étapes du deuil. On pourra cependant reprocher la partie égo-trip de Maïwenn, où par moments il était difficile de savoir qui on voyait à l’écran : Neige ou Maïwenn?

ADN, de Maïwenn. Avec Maïwenn, Fanny Ardent, Dylan Robert,… 1h30.
Sorti le 28 Octobre 2020

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