La 47ème édition du Festival du Cinéma Américain de Deauville s’acheva sur la remise du Grand Prix au film Down with the King du réalisateur français Diego Ongaro. Ayant obtenu sa première diffusion française à l’ACID (Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion) durant le Festival de Cannes en juillet dernier, le film acquière, avec ce Grand Prix, sa première récompense majeure.
Down with the King a, pour qualité principale, le fait de réussir à maintenir constamment un équilibre dans l’apport d’éléments du réel au sein de sa diégèse. Il en ressort ainsi une impression quasi documentaire, tant le récit fait preuve d’une proximité certaine à l’égard du quotidien de ses acteurs. De la sorte, le protagoniste principal, le rappeur Money Merc, qui s’isole dans une maison à la campagne afin de composer son nouvel album, est interprété par Freddie Gibbs, lui-même rappeur américain, notamment auteur du titre à succès Gang Signs. De plus, lors de son exil à la cambrousse, Money Merc fait la connaissance de Joe, fermier du Massachusetts qui initie le rappeur aux activités fermières telles que le dépeçage des vaches ou l’élevage des cochons. Une nouvelle fois, le personnage et l’interprète se confondent. Bob, le fermier, est interprété par l’acteur Bob Tarasuk, lui-même paysan et propriétaire de la ferme qui sert de lieu de tournage au long-métrage de Diego Ongaro. Les acteurs donnent ainsi énormément d’eux au coeur de leur personnage jusqu’a ce que, par moments, interprète et personnage ne fassent plus qu’un.
Le film constitue à la fois une mise en abîme de la figure du rappeur, mais également de celle du fermier. Les deux univers se confrontent et créent des étincelles, à l’image du personnage de l’agent du rappeur, s’immisçant à plusieurs reprises dans la vie de campagne que mène Money Merc dans le but de lui réclamer les démos de son prochain album. Le déferlement constant qui caractérise le monde du rap est ainsi, tout au long du film, mis en opposition au calme inaltérable de la ferme de Bob. Money Marc réfute, peu à peu, son appartenance à l’industrie musicale et prend plaisir à découvrir la vie que mène Bob, à l’écart de tout. Le rap sert ainsi essentiellement de socle au film de Ongaro qui, à partir de cette base, construit un récit portant sur le besoin de se recentrer sur soi-même. Dans Down with the King, le personnage de Money Marc questionne constamment son rapport au monde extérieur et la nécessité à produire de manière constante dans le but de ne pas être oublié du public. Ici encore, le film nuance intelligemment son propos, le rappeur oscillant constamment entre son envie de se détacher de la production musicale et son attache significative à un succès passé, le voyant donner une place centrale à ses disques d’or ou à un buste sculpté à son image.

Techniquement, le film parvient à trouver un rythme constant, même si monotone. Chaque nouveau plan résonne avec le précédent, comme si ils formaient un tout. Les deux protagonistes principaux sont souvent isolés dans des cadres, sublimant les paysages et les décors dans lesquels ils évoluent. Une forme de douceur générale s’en dégage. Le spectateur, au même titre que Money Merc, quitte sa hâte habituelle et vient trouver refuge dans cette ferme du Massachusetts. Le film se veut ainsi tel un véritable temps de pause, un refuge face au quotidien.
Down with the King c’est tout cela, mais malheureusement pas davantage. Le métrage de Ongaro maîtrise parfaitement les éléments qu’il aborde mais ne s’aventure déplorablement pas beaucoup plus loin. En résulte alors un film qui fascine autant qu’il déçoit. Down with the King, à travers ce Grand Prix remporté, souffre de la comparaison aux autres candidats de la compétition, majoritairement plus ambitieux. Cette récompense ultime vient tout de même récompenser une oeuvre à la production longue et ardue et dont le résultat final exhibe une sincérité ainsi qu’une bienveillance assurée.
Down with the King de Diego Ongaro avec Freddie Gibbs, Bob Tarasuk, Jamie Neumann…1h40