Les propositions étrangères, notamment celles issues de la péninsule coréenne, se complaisent à attirer les curiosités de la rédaction, toujours friande de leurs thématiques. The Cursed Lesson aborde un sujet récurrent de leur cinéma, mais sa lourdeur et sa capacité à annihiler toute idée de réflexion en font une bien pénible expérience.
Si la superficialité est une affaire mondiale, et que nombre des canons de beauté établis par les diktats et autres lobbys cosmétiques créent bien des problèmes à travers le globe, la Corée connaît une crise continue, énormément décriée dans son art, sans trouver de solution. Les statistiques quant au nombre de personnes recourant à la chirurgie esthétique représentent une véritable hécatombe, une banalité qui n’aurait jamais dû être mais qui a la dent longue. Postulat malheureusement “classique” lorsque Hyo-Jung, mannequin approchant de la trentaine, se retrouve sans opportunité de travail, son physique n’étant plus considéré comme correspondant aux normes sociales. L’opportunité de participer à un étrange stage de yoga, supposé lui offrir un secret de jouvence, s’offre à elle. La tentation est grande, surtout lorsqu’il s’agit d’éviter le bistouri, mais derrière ce lieu coupé du monde où les jeunes femmes doivent s’adonner à leurs leçons de souplesse et d’harmonie corporelle, de lourds secrets se dissimulent…

On se laisse premièrement porter par la fascination qui incombe aux lieux. Le cadre soigne son esthétique, un amoncellement de pièces toutes agencées différemment, proposant une variation de décors qui ne demande qu’à être exploitée. Lorsque les scènes de yoga jouent sur la modélisation des corps, c’est l’ambiance à la Suspiria qui prédomine, avec les mystères qui y sont liés. Hyo-Jung commence à porter ses soupçons lorsqu’une camarade de session perd subitement du poids, et retrouve un teint juvénile.
The Cursed Lesson ne sait jamais où se placer. Montrant clairement que des fantômes habitent les lieux, il choisit également de jouer la carte des sectes, tout en voulant sur-esthétiser certaines de ces scènes quitte à y perdre son propos. Un propos qu’il est d’ailleurs difficile de jauger, tant la critique possible, correspondant au carcan classique du cinéma coréen cité plus tôt, est oubliée en chemin au profit du sensationnalisme. Et par sensationnalisme, on entend paluchage en règle pour gros mâles libidineux. Premier élément de l’énigme qui se dévoile lorsque Hyo-Jung tente d’épier sa comparse ayant connu des changements physiques, le fameux serpent, avec lequel on nous bassine depuis le début du film et qui est censé apporter l’illumination, n’est autre qu’un homme, qui débarque huilé de la tête aux pieds, pour aller “danser” avec cette dernière. Et ce qui semble une danse “un peu osée” de prime abord s’avère dès que la caméra s’approche tout autre chose : le duo est bel et bien en train de s’envoyer en l’air à l’écran. Que l’on se comprenne, nous n’avons aucun souci à ce qu’une scène de cul soit balancée au milieu du métrage. Mais en la sur-esthétisant pour faire croire qu’elle représente l’harmonie de deux corps en transe, alors qu’on assiste à une bonne vieille levrette qui n’a d’autre but que de faire lustrer la pellicule – et le producteur, ici coréalisateur ? –, on se demande devant quoi on se trouve. Fi de la femme censée retrouver la beauté, le film nous rappelle qu’il est le travail de deux bonhommes, et que quitte à se faire du bien, autant que ce soit au détriment du sujet. Et que penser lorsqu’ensuite, dans une scène où notre chère danseuse atteint la plénitude, le film semble nous dire “Vous voyez mesdames, pour gérer vos frustrations, rien ne vaut un bon petit coup de bite” ?

Passés les coups de reins, on retourne à cette bonne vieille histoire d’esprits frappeurs planqués dans l’école de yoga, l’occasion de réaliser progressivement que la scène précédente n’a strictement servie à rien, et était donc bien une séance de branlette en règle. Merci, cinéastes, de nous rappeler que des fois, ce sont vos queues, et pas votre esprit artistique, qui tiennent la caméra. L’occasion de voir notre personnage préféré arriver, récurrente figure que le cinéma coréen aime à développer : l’Inspecteur Couillon. Il fallait bien ajouter une enquête pour ne plus laisser le suggestif et l’irréel dominer, et cette fois-ci, Couillon est bien embêté. On le voit essayer de rassembler les pièces du puzzle, rien n’y fait, il est toujours à la masse. Pourtant, une fois le climax passé et notre héroïne se retrouvant dans une chambre d’hôpital par la magie du Saint Esprit, c’est Couillon qui débarque, bien droit et fier sur ses guiboles, pour nous raconter l’intégralité de l’intrigue ! Il repart du tout début, et raconte les éléments un à un, sans en omettre le moindre, pour notre plus grand désespoir. Son personnage, fort d’être absolument inutile, sent donc le rajout à plein nez, cet artifice destiné à bien nous faire comprendre que les gens aux manettes de The Cursed Lesson nous prennent pour des abrutis. À ceci près que ce choix n’est pas si idiot.
En effet, il aura bien fallu d’une scène lisant le synopsis de A à Z, tant tout est excessivement confus dans la narration du film. Des personnages que l’on confond par leurs interactions géographiques qui n’ont jamais le moindre sens, des éléments pourtant caractérisés qui changent de propriété chaque fois qu’on les rencontre, on se perd dans une écriture aussi faussement complexe qu’elle est idiote. Cette séquence finale n’apporte finalement que peu de réponses, offre un fil conducteur que nous ne comprenons pas puisqu’il ne ressemble en rien à ce à quoi nous avons assisté, et comporte lui aussi son lot d’incohérences. The Cursed Lesson est raté de bout en bout, passe totalement à côté de ses pompes, et se permet en sus de balancer des sessions bien malsaines pour le plaisir d’on ne sait qui.
The Cursed Lesson, de Juhn Jai-Hong & Kim Ji-Han. Avec Kim Hin-Seo, Kan Mi-Youn, Jung Joo-Yeon…1h33