Le public français n’aura jamais autant entendu parlé de Ruth Bader Ginsburg que ces derniers mois. Alors qu’en octobre dernier le documentaire “RBG” réalisé par Betsy West retraçait la vie de celle qu’on surnomme aujourd’hui “Notorious RBG”, c’est début 2019 qu’est venu sur nos écrans “Une femme d’exception”. Ce dernier se concentrant principalement sur les débuts compliqués de la jeune avocate alors qu’elle concilie vie professionnelle, vie de famille et un mari souffrant. Un biopic certes classique mais nécessaire en tant que figure féminine.
Véritable figure de la culture pop-américaine, Ruth Bader Ginsburg fait partie des neuf juges à la Cour Suprême aka la plus haute juridiction américaine. À 85 ans, cette avocate spécialiste des droits des femmes s’est fait connaître dans les années 70 en défendant plusieurs affaires devant la Cour Suprême (elle a gagné la plupart des affaires qu’elle a défendu) tout en pointant constamment du doigt les discriminations qui touchent aussi bien les femmes que les hommes. S’en suit une carrière incroyable pour celle qui combat également la politique de Donald Trump et qui est l’une des dernières grandes figures du parti démocrate américain.
Mais cette carrière commença de manière houleuse, bien même avant de devenir avocate comme le raconte “Une femme d’exception”. Acceptée à la prestigieuse Harvard School of Law en 1956 parmi huit autres femmes – sur environ 500 hommes -, Ruth Bader Ginsburg (Felicity Jones juste au regard déterminé tout au long du film) doit d’ores et déjà se battre contre un monde – et une société – résolument masculin d’autant plus avec un doyen aux moeurs qui puent le patriarcat à dix kilomètres. Mère de famille mais aussi femme aimante et attentionnée – Ruth va suivre en plus de ses cours ceux de son mari Martin (Armie Hammer impliqué) à qui on vient de diagnostiquer un cancer -, cette avocate en devenir va devoir se battre dans une jungle masculine alors qu’elle prend en charge avec son mari une première affaire qui dessinait déjà les combats futurs de RBG : les discriminations basées sur le genre. Mais tout ceci n’est finalement que secondaire, même si on sort de là en ayant envie d’en voir encore plus, “Une femme d’exception” dessine surtout un portrait d’une femme érigée en modèle et qui semble avoir encore plus sa place aujourd’hui en 2019.
Combat contre le sexisme, mener de front plusieurs vies et subir constamment une pression pour prouver qu’on est capable de faire aussi bien qu’un homme. Le combat de Ruth Bader Ginsburg dans les années 70 est – malheureusement – toujours le même aujourd’hui. Le syndrome de l’imposteur dont les plus malveillants sont capable de nous faire ressentir avec leurs “Tu n’y arriveras pas”, “Laisse tomber”, des phrases qu’entendaient déjà la jeune femme et qu’on n’hésite pas à nous rabâcher encore aujourd’hui. Et qu’aurait été cette femme d’exception sans son mari Martin ? Loin d’ériger de nouveau ce lien de cause à effet (Une femme a besoin d’un homme pour réussir), le film de Mimi Leder dessine avec subtilité un mari qui a su s’effacer pour laisser le devant de la scène à sa femme – alors qu’il était un avocat tout aussi brillant avec de véritables facilités d’élocution – tout en continuant de la soutenir car oui il est là le secret, arrêter ce combat perpétuel entre hommes et femmes, arrêter cette guerre d’égo que certains mâles peuvent avoir pour qu’ils comprennent enfin que la femme n’est pas là pour effacer l’homme mais qu’à deux ils peuvent s’entraider pour réussir. Tout est une question d’équilibre dans ce film, finalement ça l’est aussi dans la vie.
Malgré un biopic classique en tout point – ce qu’on peut aisément lui reprocher -, “Une femme d’exception” dépasse largement le cadre du biopic pour offrir une figure à suivre, un message à faire passer à toutes les jeunes femmes car oui, nous sommes toutes des femmes d’exception.
Une femme d’exception de Mimi Leder. Avec Felicity Jones, Armie Hammer, Justin Theroux… 2h
Sortie le 2 janvier