“Tout le monde peut se tromper” nous l’affiche. Même Jalil Lespert. Celui qui avait brillé de talent avec Yves Saint Laurent et Iris commet ici sa première boulette. Et pourtant, vu le matériau d’origine, il semblait compliqué de ne pas s’en sortir. Pièce mythique de Georges Feydeau, Le Dindon à la sauce comédie française 2019 est un four absolu.
123 ans plus tard, la recette est toujours la même. Monsieur de Pontagnac – dragueur invétéré – tombe sous le charme d’une femme qu’il suit jusque chez elle sans savoir qu’elle est mariée à un de ses amis, Vatelin. De là, toute une galerie de personnages apparaît. Rediop, soupirant de Victoire (la femme de Vatelin), mais également Madame de Pontagnac et Suzy, la maîtresse de Vatelin. De petits mensonges à grosses cachotteries en passant par quelques infidélités, tout ce joyeux petit monde va devoir régler ses comptes.
La première grosse erreur de Jalil Lespert pour cette adaptation est d’avoir voulu la transposer dans les années 60. Si cette ambiance sixties est toujours plus colorée et pétillante à voir à l’écran (et se prête plutôt bien à la théâtralité du film) c’est en choisissant de respecter le texte à la lettre – d’y poser un simple copié/collé – que Jalil Lespert oublie une chose importante : ses personnages féminins ne se comportent pas de la même façon au 19ème siècle que dans les années 60. Ancrer des potiches qui ne savent rien faire d’autre que hurler, se cambrer et se déshabiller à une période où les mouvements féministes prenaient de plus en plus d’ampleur, c’est couillu bien que très con. De quoi rendre Alice Pol très irritable, comme dans la plupart de ses films, ou Camille Lellouche insupportable, comme dans la plupart de ses films. Même Laure Calamy ne parvient pas à se dépêtrer de cette bouillasse sans nom. De l’autre côté, le trio Boon/Gallienne/Sylla ne fait pas bien mieux. Le chef de file Dany Boon s’use avec ses mimiques répétitives, Guillaume Gallienne – qui a pourtant joué des centaines de fois Monsieur de Pontagnac au théâtre – perd toute saveur et Ahmed Sylla s’en sort comme il peut. À se demander comment ils ont réussi à convaincre Holt McCallany (Mindhunter) de rejoindre ce projet.
Ajoutez à ce casting insipide aucun effort de mise en scène, un sur-découpage à vous faire griller plus d’un neurone et énormément de vannes qui tombent à plat, Le Dindon est un film (et encore le mot est grand pour ce que c’est) fait à la spatule. Des ingrédients pris-par ci par-là, étalés grossièrement puis recouvert d’une distribution aux noms rentables du moment pour cacher la misère de ce Vaudeville qui ne fait ni rire, ni pleurer, mais surtout bailler.
Le Dindon de Jalil Lespert. Avec Dany Boon, Alice Pol, Guillaume Gallienne…1h25
Sortie le 25 septembre