Dark Meat City, une mégalopole californienne où cohabitent un nombre incalculable d’habitants de toutes les origines. Dans ce Los Angeles version maléfique, Angelino et Vinz sont deux copains d’enfance qui essaient tant bien que mal de s’en sortir. Totalement marginalisés, les deux comparses mènent une vie tranquille dans leur appart’ miteux jusqu’au jour où Angelino est victime d’un accident de scooter lui provoquant d‘étranges hallucinations et se retrouver pourchassé par une bande d’hommes habillés en noir. Le début des emmerdes pour Angelino et Vinz quoi.
Projet complètement sous LSD qui germe dans la tête de Guillaume Renard – alias Run pour les plus familiers – depuis déjà un bon paquet d’années, c’est d’abord avec un court-métrage de 7 minutes appelé “Mutafukaz : Opération Blackhead” sorti en 2002 que l’aventure prend forme. Les prémices des aventures d’Angelino et Vinz qui sent déjà bon l’animation décomplexée et borderline. Puis c’est en 2006 que la bande-dessinée Mutafukaz voit le jour d’où découlera également un spin-off sobrement intitulé Puta Madre.
Après près de huit ans de travail et de gestation, Mutafukaz version animé prend enfin vie dans un premier long-métrage à quatre mains avec celles d’abord de son créateur original Guillaume Renard ainsi qu’avec l’aide de Shoujiro Nishima. Une collaboration entre le studio Ankama – qui espère se rattraper après le bide Dofus – et le studio 4°C – après Amer Béton et Mind Game – qui fait des étincelles. Mutafukaz est aussi efficace sur papier glacé que sur grand écran et pour cause, le matériel de base est respecté. Reprenant la trame du premier tome, avant de s’autoriser quelques embardées digne des meilleurs trips sous des drogues peu recommandables, on suit donc le quotidien de deux marginalisés – l’un a la peau aussi noire que du charbon tandis que le second a une tête de mort enflammée – dans une sorte de Los Angeles bis où règne la violence et le chacun pour soi.
Absolument furieux dans sa réalisation, Mutafukaz ne laisse pas une minute de répit à ses spectateurs qui emmagasine des tonnes d’informations jusqu’à n’en plus pouvoir, témoignant de la générosité avec laquelle fait preuve le papa d’Angelino et Vinz sans oublier de briser de temps à autre le quatrième mur – tout en gardant son dynamisme – avec une énergie folle, des punchlines et vannes toujours bien senties. Le film pose également – derrière ce surplus d’action et gun-fights – de vraies questions quant à l’amitié et le fait de choisir qui on veut devenir. Des thèmes et un scénario plutôt simplistes qui contrebalancent justement avec tout le barnum visuel.
Un duo de copains aussi attendrissants qu’ils sont hilarants et qui de mieux qu’Orelsan et Gringe (Bloqués, Comment c’est loin) pour incarner ces deux bras cassés ? À croire que ces personnages étaient fait pour eux et pour les adeptes de Bloqués, l’appartement miteux et le canapé en piètre état vous seront familiers. De leurs voix je m’en foutiste absolument délicieuses, les deux artistes ne cachent cependant pas quelques faiblesses dans l’interprétation qui rend finalement le tout encore plus humain et attachant.
Véritable trip absolument déluré, crash, sanglant et assumé, Mutafukaz est une très belle réussite franco-nippone qui a le mérite de bousculer un petit peu le monde du film d’animation un peu triste ces dernières années. Aussi féroce qu’il est généreux avec nous, Guillaume Renard nous prouve que l’animation française en a encore sous le crayon et nous on en redemande forcément.
Mutafukaz de Guillaume Renard et Shoujirou Nishimi. Avec les voix d’Orelsan, Gringe… 1h30
Sortie le 23 mai
Très bonne critique.
Je croise les doigts pour qu’il sorte par chez moi.