New York, le Bronx, fin des années 70. Quartier en effervescence, en proie à une criminalité sauvage, où l’ambiance se mêle à la peur. Là, dans un appartement qu’elle délabre avec laxisme, June, célèbre autrice victime d’un succès qui l’a plongé dans un état de paranoïa total, regarde le monde à travers sa fenêtre, et alimente sa peur de l’extérieur, des autres, des dangers qu’elle constate se mêlant à ceux qu’elle s’invente.
Cet état émotionnel, il ne suffit que d’un plan pour le comprendre. L’ouverture se fait sur le regard de June, un regard brisé, en larmes, qui annonce en quelques secondes la folie compulsive dans laquelle s’est enfermée le personnage. Naomi Watts est évidemment un choix judicieux pour nous offrir une palette de jeu riche, qui arrive à nous faire transparaître tous ses aspects paranoïaques. La détresse se ressent, l’once de folie aussi, et on accompagne ce personnage dans sa névrose. Le calme qu’elle essaie d’apposer à son cadre est régulièrement dérangé par la sonnerie de son interphone. Le danger devient tortionnaire, la dévore, elle qui ne peut sortir sans ressentir la nausée l’envahir. Tout ce qui est extérieur à l’appartement l’est pour nous aussi : à l’instar de June, nous ne sortons jamais de la pièce, et cet interphone qui n’a d’autre réponse que le silence devient un danger pour nous aussi, attise la persuasion que quelque chose arrive.
Le seul cadre extérieur que l’on nous offre, c’est cette rue, que l’on voit à peine, et les différents flashs d’informations que l’on perçoit, jamais en premier plan, dans les communiqués radio ou à la télévision. Le climat est évidemment austère, ce qui accentue notre compréhension quant à la volonté de June de rester là où elle se sent à peu près en sécurité. On y entend l’histoire de David Berkowitz, connu sous le nom du « Fils de Sam », menace flottante quasi-irréelle dont on ne sait si elle va se greffer à l’histoire ou juste être un élément de la folie de June. Peu à peu, quelques autres protagonistes interviennent, et nous désarçonnent quant aux convictions que l’on peut avoir. L’idée principale étant de se demander si ce que nous offre la caméra est réel ou si elle n’est que le miroir de la névrose de June. Ces nouveaux personnages accentuent le doute, on commence à rejoindre la paranoïa et la persuasion d’une menace qui nous semble de plus en plus proche.
Pourtant, malgré une ambiance soignée et des éléments forts qui apportent une expérience intéressante, on ne peut s’empêcher de ressentir un certain ennui. Le talent d’Alistair Banks Griffin est tel que tout est rapidement mis en place de manière efficace. Les tenants de la trame sont clairs, et au lieu de faire démarrer son intrigue sur ce postulat fort, le réalisateur préfère la faire tourner en rond. À tel point que quand le climax est censé arriver, c’est finalement la conclusion qui s’amorce. Une conclusion morne, qui joue sur le grandiose sans grande logique, et veut juste jouer au twist facile.
Avec la conviction qu’une seconde lecture apportera des clés de compréhension différentes, et ne laissera pas comme impression qu’une déception face au final assez creux, The Wolf Hour reste une œuvre intéressante sur la paranoïa, sur les écrivain·e·s qui ne se distinguent plus de leurs personnages quand ces derniers sont torturés. Une histoire que Stephen King ne renierait pas, aux qualités indéniables, mais à qui il manque un certain aboutissement pour convaincre.
The Wolf Hour de Alistair Banks Griffin. Avec Naomi Watts, Emory Cohen, Jennifer Ehle… 1h39
Sortie prochaine