Il y a des années où certain·es acteur·ices se démarquent par leurs choix cinématographiques. En 2022, c’est Roschdy Zem qui nous offre jusque là un sans faute. Aperçu plus tôt dans l’année dans Enquête sur un scandale d’état, puis donnant la réplique à Virginie Efira dans Les enfants des autres avant de rejoindre Louis Garrel dans L’Innocent, l’acteur est finalement revenu derrière la caméra pour son sixième long-métrage.
Moussa est un pilier de la famille. Altruiste, enjoué et d’une gentillesse incomparable, il cache pourtant un mal-être profond qui se révèle après une malheureuse chute lui provoquant une commotion cérébrale. Du jour au lendemain, le père de famille change, ayant perdu tout filtre et osant exprimer ses pires pensées. Un coup dur pour la famille qui commence à se disloquer, ayant de plus en plus de mal à supporter Moussa excepté Ryad, son frère.
Une fois encore, Roschdy Zem aborde un sujet qui lui est très personnel. En effet, cette histoire s’inspire de sa propre vie et de son frère qui, après un choc à la tête, est devenu une personne au franc-parler détonnant et sans pitié. De cet accident, le réalisateur en tire une histoire de famille universelle. Nous voilà plongé·es au cœur de cette famille qui déborde d’amour sans pouvoir le verbaliser. Cependant, le déjeuner vire aux règlements de comptes quant plusieurs personnes reprochent à Ryad (Roschdy Zem) d’être beaucoup trop absorbé par son métier à tel point d’en délaisser sa famille et sa compagne Emma (Maïwenn). Dès cette scène d’exposition, on comprend les tenants et aboutissants, notamment ces non-dits qui font finalement plus de mal que de bien. Co-écrit avec Maïwenn, Les Miens prend des airs d’ADN lors des moments familiaux, ce qui est loin d’être déplaisant puisqu’il arrive à trouver son équilibre entre franche comédie et moments dramatiques tout aussi assumés.

Obligés de se relayer à tour de rôle pour s’occuper de Moussa qui se contente de comater ou râler depuis son accident, chaque membre de cette famille va en prendre pour son grade que ce soit Ryad et son manque d’intérêt pour sa famille, Samia qui doit endosser tout le poids de ses frères sur ses frêles épaules ou encore Nesrine, la fille de Moussa, qui voit ses plans d’études être compromis. En déroulant son récit, Roschdy Zem développe son propos quant à la notion de vérité. Toute vérité est-elle bonne à dire ? Il semblerait que la propension de l’humain à se retenir de certaines l’empêcherait de vivre comme il le devrait. Totalement désinhibé, Moussa peut vivre librement, se couper des nouvelles technologies pour revenir à quelque chose de plus primaire et remettre en avant la parole nécessaire entre les membres d’une famille pour réussir à s’entendre et s’aimer. Sami Bouajila fait un travail extraordinaire, offrant deux visages diamétralement opposés. Le second étant celui qui nous offre les meilleures scènes d’insultes que ce soit envers sa cousine ou son patron qui n’a pas attendu bien longtemps pour le remplacer. Tout le reste du casting n’est certainement pas en reste : Meriem Serbah et Nina Zem apportent une douceur bienvenue, là où Roschdy Zem brille par son ambiguïté.
Tout comme le récit, la mise en scène est également d’une finesse extrême, jouant de plusieurs caméras qui tournent en plan séquence lors des scènes familiales permettant de capter à merveille l’énergie du groupe. Ce qui fait de Les Miens un film extrêmement doux et plaisant à suivre, c’est la sincérité avec laquelle il a été écrit et réalisé. En ne s’attardant à aucun moment sur les origines ou la religion de cette famille, Roschdy Zem nous offre un portrait familial dans lequel chacun·e saura se reconnaître.
Les Miens de et avec Roschdy Zem. Écrit par Maïwenn et Roschdy Zem. Avec aussi Sami Bouajila, Meriem Serbah, Maïwenn… 1h25
Sortie le 23 novembre 2022